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Editorial : La sensibilisation, seule, ne suffit pas - Par Hassan GHEDIRI

Lorsqu’on évoque les accidents de transport les plus meurtriers, l’on pense toujours aux crashs d’avions survenus au cours de ces dernières années, un peu partout dans le monde. Seulement, la surmédiatisation de catastrophes aériennes dans le monde a, toujours, tendance à masquer les chiffres dramatiques des accidents routiers.  En Tunisie, un très mauvais élève en matière de sécurité routière, les accidents ne choquent plus personne. Cela est devenu un phénomène ordinaire et étrangement marginalisé par les politiques publiques. Pour mesurer à sa juste valeur l’ampleur du fléau, imagions que deux ou trois avions de notre flotte nationale s’écrasent, chaque année, causant plusieurs centaines de morts. Ce serait le pire drame que pouvait frapper la Tunisie. Pourtant, nous sommes bel et bien en plein dedans. Parce que chaque année, entre 700 et 1000 Tunisiens meurent sur la route. C’est tout simplement l’équivalent du crash d’au moins trois Airbus A330.
Entre le 1er janvier et le 15 septembre 2025, la Tunisie a enregistré 3.588 accidents de circulation, et ce, selon l’Observatoire national de la sécurité routière (ONSR). Mais si les statistiques affichent un recul de 609 accidents par rapport à la même période de l’année précédente, le nombre de morts a, par contre, bondi de plus de 8% en atteignant 863 décès, selon le dernier décompte fait lundi 15 septembre. Un peu plus de 4.800 blessés ont été par ailleurs recensés. Des chiffres que les journaux de la place reprennent pour meubler leurs pages de qui n’apparaissent presque jamais à l’ordre du jour du gouvernement lors de définition des actions prioritaires. Certes, l’ONSR annonce une baisse du nombre d’accidents depuis janvier dernier en comparaison avec la même période de l’année dernière, mais ce recul est loin d’être le résultat d’une politique élaborée autour d’un ensemble d’actions et qui se fixe des objectifs bien définis. Aucune stratégie digne de ce nom n’a été en fait adoptée pour mettre fin à cette hémorragie qui dure depuis des décennies.  Alors que les autorités se contentent jusqu’ici de dresser les bilans en espérant voir les choses changer, l’insécurité routière est devenue l’une des premières causes de mortalité dans notre pays causant des pertes économiques considérables qui avoisinent annuellement les 10 milliards de dinars. 
Pour inverser la courbe des accidents, il faut commencer par mettre fin au laxisme généralisé. De grands chantiers doivent ensuite être lancés, dont la mise à niveau intégrale d’un réseau routier impraticable. Il faut aussi agir avec la plus grande fermeté contre les conducteurs imprudents qui détenteurs de permis frauduleux qui s’aventurent sur les routes du pays à bord des cercueils roulants. Autant de facteurs de risque pointés dans les rapports de l’Organisation Mondiale de la Santé. Il est, en effet, clair que des pays qui ont fait des progrès en matière de la sécurité routière, comme la Suède, la France ou la Suisse, ont pris des décisions au plus haut niveau de l’Etat, pour s’attaquer aux problèmes par la mise en place des plans d’actions multisectoriels, avec des lois appropriées. Il faut qu’il y ait une décision politique.  Impliquant tous les acteurs au plus haut niveau de l’Etat, en plus des organisations de la société civile en charge la sécurité routière. Les choses ne changeront jamais sans une transformation radicale des comportements. Or, la prévention, aujourd’hui axée sur des campagnes de sensibilisation conjoncturelles et routinières, est vouée à l’échec. Il est urgent de repenser les politiques de la sécurité routière pour espérer transformer les mentalités. La sensibilisation, seule, ne suffit pas. Elle doit s’accompagner d’un arsenal de sanctions dissuasives et répressives. C’est cette combinaison de prévention active et de répression ferme qui a permis de sauver des milliers de vies.
H.G.
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