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Transport public : Ces « cadeaux empoisonnés » offerts à la Transtu…

Par Hassan GHEDIRI

 

La société des Transports Publics Genevois (TPG) a décidé de faire un don de 200 autobus à Transtu. Le transporteur suisse entend en effet électrifier entièrement sa flotte d’ici à 2030…

Après la France qui a livré au mois de juin dernier un lot de 165 bus offerts gratuitement à la société de transport de Tunis (Transtu), c’est donc au tour de la Suisse de faire preuve de « générosité » envers notre pays.  Un cadeau de même nature qui sera très prochainement expédié depuis Genève vers Tunis. C’est un don composé de 200 autobus « en bon état », destiné à Transtu, qui sera  en principe livré en quatre temps. La première livraison aura lieu au mois de janvier 2026. 

Transtu qui multiplie les partenaires et les fournisseurs pour renouveler sa flotte a fait plusieurs acquisitions au cours de ces dernières années dont la dernière en date un lot de 300 bus dans le cadre d’un marché conclu avec un constructeur chinois. Les bus d’occasion qui avaient plus de quinze ans d’âge et qui ne pouvaient plus circuler en France forment toutefois une bonne partie des acquisitions faites ces dernières années par la Tunisie. En 2024, notre pays a en effet acheté 600 bus d’occasion qui étaient exploités par la RATP (régie autonome de transport de Paris) pour l’équivalent d’un peu plus de 20 millions de dinars. En guise de cadeau, la Tunisie a eu droit à un don de 165 bus. En fait, comme partout en Europe, le transporteur francilien a entamé un ambitieux programme de transformation de sa flotte en migrant progressivement vers les véhicules électriques. Un programme baptisé Bus2025 lancé en 2014 par la RATP et Île-de-France Mobilités vise ainsi à convertir la plus grande majorité du parc exploité dans l’Hexagone à l’électrique et au biomasse à l’horizon 2025. Tous les bus thermiques (moteur diésel) ne seront donc plus utilisés en France. Dans son plan «Bus2025 », la RATP a fixé comme objectif de transformer sa flotte composée de près de 4500 bus, à même d’avoir 80% de bus 100% électriques et 20% de bus au biogaz.  

Même choix fait par Transport Publics Genevois (TPG) qui, comme nous l’avons annoncé ci-haut a décidé de faire un don de 200 bus thermiques à la Transtu. La compagnie suisse a en effet entamé, à son tour, sa transition vers le 100% électrique, ce qui implique l’abandon de l’ensemble de sa flotte à motorisation thermique. Et au lieu de les détruire, les autorités suisses ont décidé de céder ces bus à des pays qui ne comptent toujours pas se passer des énergies fossiles dans le transport public, comme la Tunisie.  

90%

Dans un document intitulé « Budget Citoyen de 2025 » élaboré par le ministère des Finances et publié sur son site web, il est noté que la subvention aux carburants dépassera les 7 milliards de dinars (MD) avec une enveloppe estimée à 1,7 MD allouée au transport. Selon le même document qui prévoit les dépenses et les recettes de l’Etat pour l’année en cours, environ 6% des dépenses consacrées aux subventions en Tunisie vont au transport public. A noter également que le transport est le secteur qui consomme le plus d'énergie en Tunisie, avec près de 36% du total de l’énergie finale consommée et plus de 55% de la consommation nationale des produits pétroliers. Le transport routier seul accapare plus de 90% de l’énergie finale consommée. 

Les bus offerts par la France et la Suisse et peut-être, prochainement, d’autres pays de l’Union européenne qui prévoit d’interdire en 2035 la vente des véhicules neufs à moteur thermique, y compris hybride, ressemblent beaucoup plus à un « cadeau empoisonné » au vu du coût économique et écologique qu’ils impliquent pour notre pays. Les économies faites que ce soit par l’acquisition des bus d’occasion de plus en plus interdits de circuler en Europe ou bien des véhicules à motorisation thermique fournis par les constructeurs européens et chinois n’auront en fin de compte aucune utilité tellement la facture de l’énergie fossile est considérable.  

C’est pour cette raison que la Tunisie doit envisager sérieusement une stratégie de conversion progressive de son parc de transport public vers l’électrification. Attendre que notre pays deviendra un « dépotoir » des bus thermiques rejeté par l’Occident serait une grande erreur. Car, tarder à enclencher cette transformation cela ne fait qu’aggraver davantage la dépendance à l’importation des hydrocarbures qui constituent déjà le premier poste de dépense et de compensation et en même temps la principale cause du déficit commercial de notre pays. L’investissement dans des infrastructures de recharge et dans des flottes de transport électrique nécessite certes des financements colossaux, mais s’agissant d’un secteur qui accapare plus de 90% des énergies consommées et coûte chaque année à l’Etat près de 2 milliards de dinars de subvention, l’électrification permet de réduire considérablement notre dépendance énergétique et de développer la mobilité durable.

H.G.

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