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Editorial : Pour la gloire de la Tunisie…

Par Chokri Baccouche

Les champions font toujours rêver. Leurs exploits, leur ascension et leurs records font vibrer les spectateurs ou les téléspectateurs qui assistent à leur performance. Chacun dans sa discipline de prédilection, ces hommes et femmes hors normes ont le mérite de pousser avec courage et abnégation les limites de l’endurance. Au prix d’énormes sacrifices et d’un travail assidu et sans répit, ils ont appris à apprivoiser la souffrance physique et endurer les privations pour être fin prêts le jour J, celui des grandes compétitions internationales où ils devront tout donner dans l’espoir d’arracher leur ticket d’entrée au Panthéon des illustres sportifs de haut niveau qui ont marqué l’histoire.
La Tunisie foisonne de champions particulièrement dans le domaine du sport individuel. La remarquable performance du jeune nageur tunisien Ahmed Jaouadi qui vient de glaner haut la main deux médailles d’or aux Championnats du monde de natation de Singapour illustre de manière évidente ce constat. L’exploit est historique et la consécration est amplement méritée. Dans les bassins de Singapour, petit pays connu pour ses prouesses économiques qui lui ont valu le surnom de Dragon du Sud-Est asiatique, Ahmed Jaouadi s’est mesuré aux plus grands nageurs du monde. Il a porté très haut l’étendard national à la grande fierté de tout un peuple. Il a donné à l’excellence tunisienne ses titres de noblesse et il a le grand mérite d’avoir atteint les plus hautes marches du podium dans cette joute sportive planétaire, sans l’assistance des instances sportives de son pays, censées encadrer et fournir toute l’aide nécessaire aux sportifs tunisiens.
On croit savoir à cet effet que des généreux bénévoles tunisiens à la fibre patriotique insoupçonnée ont pris en main la préparation du jeune nageur et ce, plusieurs mois avant le début de la compétition. Ces compatriotes établis pour la plupart à l’étranger exercent dans des domaines aussi variés que la médecine, le commerce et les professions libérales. Tous sont animés par la volonté de voir le drapeau national flotter haut lors des joutes sportives comme celle de Singapour. Cette ligue de gentlemen généreux et profondément tunisiens s’est chargée en effet de fournir tout ce dont a besoin Ahmed Jaouadi qui a rencontré, croit-on savoir, des difficultés administratives et financières, allant jusqu’à emprunter de l’argent à des proches pour pouvoir poursuivre sa préparation. Ils méritent d’autant plus les éloges et la considération qu’ils ont agi spontanément à l’ombre. Ils ont donné sans attendre de recevoir. Ces généreux mécènes cueillent ainsi le fruit de leur altruisme grâce au triomphe de leur poulain et c’est là où résident leur plus grande satisfaction et leur honorable réalisation.
Ces hommes d’honneur qui ont agi à l’ombre ont fait le travail qui devait revenir en principe à la Fédération tunisienne de natation. Celle-ci a joué malheureusement aux abonnés absents et n’a même pas daigné se décarcasser après la consécration de notre champion. Malgré sa remarquable performance, Ahmed Jaouadi n’a pas eu droit en effet à un accueil digne d’un champion. Son retour au bercail il y a quelques jours s’est déroulé dans l’indifférence quasi-totale. Aucun représentant officiel et aucune présence du ministère des Sports n’ont été enregistrés à l’aéroport. Les siestes, chez nous, sont apparemment plus sacrées que les performances sportives. Les champions sont malheureusement traités avec peu d’égard voire un certain mépris. Cette négligence est non seulement scandaleuse mais également inacceptable. Elle constitue un acte indigne de commis de l’Etat qui sont pourtant censés donner le bon exemple et d’encourager les compétences mais qui ont malheureusement failli à leur devoir moral et professionnel. Rien ne saurait justifier une incurie aussi honteuse qui constitue le chemin le plus court pour tuer dans l’œuf les bonnes initiatives et la volonté de se surpasser. La médiocratie, décidément, n’arrête pas de faire des dégâts et de porter gravement préjudice aux intérêts suprêmes du pays. Heureusement que Kaïs Saïed a rattrapé le coup en décernant à notre champion le premier grade de l’Ordre national du Mérite dans le secteur du sport au cours d’une cérémonie officielle tenue, avant-hier, au palais de Carthage. Un hommage et une reconnaissance amplement mérités pour Ahmed Jaouadi qui a honoré son pays de la plus belle des manières avec des moyens dérisoires mais une volonté et une détermination de fer. Aux âmes bien nées, la valeur se forge dans le moule du patriotisme sincère pour la gloire de la Tunisie…

C.B.

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