contactez-nous au 71 331 000
Abonnement

Cinéma -« La voix de Hind Rajab » de Kaouther Ben Hania : ... Une voix qui traverse les murs du silence

Par Imen ABDERRAHMANI

 

Après avoir bel et bien résonné à Venise, «La voix de Hind Rajab» résonnera à partir du 17 septembre dans les salles de cinéma tunisiennes. Il se lèvera partout dans le monde, rappelant la tragédie de Hind Rajab et des milliers d’enfants palestiniens qui tombent au quotidien sous les tirs barbares de l’entité sioniste.


«S’il te plaît viens me chercher. J’ai peur», a supplié la petite gazaouie Hind Rajab, âgée d’à peine de cinq printemps, Omar, l'un des opérateurs du centre d’appel du Croissant-Rouge palestinien. Mais pour pouvoir intervenir et envoyer les secouristes, il fallait de nombreuses autorisations et il fallait coordonner avec l’armée israélienne qui doit donner son feu vert. Et avec les sionistes, la question humanitaire ne se pose jamais.
Projeté en avant-première devant un parterre de journalistes tunisiens et étrangers, à la salle « Le Colisée », le film de Kaouther Ben Hania, « La voix de Hind Rajab », est attendu à plus d’un titre. Projeté en compétition à la Mostra de Venise, mercredi 3 septembre, le film a reçu une standing ovation record de 24 minutes après avoir bouleversé les spectateurs du Lido, réussissant à faire parler de nouveau de Hind Rajab, des enfants palestiniens qui souffrent non seulement aujourd’hui de la barbarie de l’armée sioniste mais aussi de la famine. Outre la bonne sélection des prix parallèles remportés de Venise, le film a su décrocher Le Lion d’argent de la Mostra de Venise, une première pour le cinéma tunisien.
Joué dans un huis-clos, dans le Centre d’appel du Croissant-Rouge palestinien, le film est à la croisée des genres.
Docu-fiction, basé sur des enregistrements audios, «La voix de Hind Rajab» met en scène les derniers jours de cette fillette palestinienne qui a été pour de longues heures coincées dans une voiture, entourée de six cadavres et effrayée par les chars israéliens qui tirent partout et qui ont déjà ciblé la voiture de ses proches.
Mêlant réalité et fiction, car il n’y a pas de frontières entre les deux, et puisque tout ce qui se passe actuellement à Gaza est inimaginable, le film est une reconstitution des dernières heures de cette fillette dont l'histoire a bouleversé le monde.

Le cri d'une fillette piégée 
Le film de 1h30 se déroule dans le centre d’appel du Croissant-Rouge, sous tension entre la volonté de secourir la fillette et la nécessité de respecter les protocoles d’urgence et ne pas mettre en danger les sauveteurs. La réalisatrice peint l'atmosphère émotionnelle et mentale, explore la psychologie de quatre personnes qui faisaient le suivi de cette situation délicate: Omar, le premier qui a reçu l'appel, et qui a été bouleversé voulant à tout prix sauver la fillette; Rana, qui a été également à de nombreuses reprises au téléphone avec Hind, tentant de la rassurer et de la soutenir; Mahdi, le chef du Centre qui a été tiraillé par son devoir de faire respecter les protocoles pour ne pas perdre les derniers secouristes au nord de Gaza et son devoir humanitaire et Nesrine, psychologue qui tentait d'aider l'équipe à surmonter le choc et Hind à tenir bon jusqu'à l'arrivée des secouristes.
La réalisatrice utilise les véritables appels de Hind, mais fait rejouer les scènes dans le film qui retracera son histoire du point de vue des opérateurs du Croissant-Rouge palestinien qui étaient en ligne avec la petite fille durant le bombardement au cours duquel elle a perdu la vie.
Le film raconte ces moments d'espoir (qui ont été rares ) tels que l'écoute de la voix de Hind après des tirs, confirmant qu'elle est encore en vie ou l'obtention du green light (feu vert) et les moments de désespoir et d'impuissance quand l'équipe s'est trouvée confrontée à un protocole alors que la fillette pleurait d'effroi, avec les coupures successives du téléphone qui faisaient croire aux opérateurs que Hind est morte... Mais voilà quand tout semblait aller au mieux et les ambulanciers réussissent à surpasser les difficultés, tout bascule avec ces nouveaux tirs...

La mémoire comme ultime résistance
Film engagé, "La voix de Hind Rajab", au-delà d'être un hommage à cette Gazaouie, il s'interroge sur le destin des enfants palestiniens, sur de nombreux accords des droits de l'homme violés à chaque instant par les sionistes, sur ces frappes continues ciblant les ambulanciers et les travailleurs humanitaires...
Pour bien tirer son épingle du jeu, la réalisatrice a fait appel à des acteurs palestiniens qui ont réussi à merveille à porter la voix des opérateurs des centres du Croissant-Rouge qui reçoivent chaque jour des innombrables appels à secours et qui se trouvent très souvent incapables d'aider pour des raisons qui leur échappent. Elle a également pris le témoignage de la mère de Hind, ajoutant une version intime au film. Le film s'achève avec un petit rappel pour ceux qui ont la mémoire courte: il faut douze jours pour que le Croissant-Rouge parvienne à envoyer une nouvelle équipe sur place. Elle y découvre "les corps en décomposition" de Hind Rajab et de ses proches, dans une voiture "criblée de balles", révèle un rapport de l'ONU (Nouvelle fenêtre) rendu public en juillet 2024. L'ambulance venue à sa recherche est retrouvée quelques dizaines de mètres plus loin, "complètement détruite", avec à son bord "les dépouilles de deux secouristes", précise le document.
Après avoir résonné à Venise, la voix de Hind Rajab résonnera dans les salles de cinéma tunisiennes, coïncidant avec les préparatifs de la flottille Soumoud pour prendre la mer, afin de briser le blocus sur Gaza. Il résonnera encore dans plusieurs salles de cinéma dans le monde et des écrans des festivals, dérangeant ceux qui préfèrent fermer les yeux sur les génocides commis par l’armée israélienne.
"La voix de Hind Rajab", à partir du 17 septembre dans les salles de cinéma tunisiennes.

I.A.

Partage
  • 25 Avenue Jean Jaurès 1000 Tunis R.P - TUNIS
  • 71 331 000
  • 71 340 600 / 71 252 869