Par Imen ABDERRAHMANI
Il nous a quittés en juillet dernier. Hamadi Ben Saâd, qui a été un peintre caméléon, changeant toujours de style et d’approche sera célébré lors d’une exposition-hommage à la galerie «La Boîte» à La Charguia dont le vernissage est aujourd’hui à 16h30.
Il est l’un des peintres tunisiens les plus originaux. Toujours souriant, généreux et profondément humain, Hamadi Ben Saâd a été une figure familière de la médina de Tunis et du centre-ville de Tunis. Artiste contemporain qui a marqué de son empreinte la scène artistique nationale --et dont les œuvres sont très appréciées par les collectionneurs -- sera raconté et célébré lors d’une cérémonie commémorative qu’organise et accueille aujourd’hui «La Boîte», ce lieu d’art contemporain à La Charguia, en présence de ses proches, de sa famille et de ses amis.
À cette occasion, seront présentées des œuvres issues de « Voyage de l’âme », sa dernière exposition tenue à cette galerie d’art en juin 2022, accompagnées d’archives visuelles et de ses mémoires sonores captées par Laetitia Kozlova, artiste et chercheuse spécialisée dans les nouvelles formes d’écoute de la voix parlée enregistrée, précisent les organisateurs dans un bref communiqué de presse, sur les réseaux sociaux.
Ce moment de commémoration se veut également une ouverture sur l’univers intime de l’artiste, proposé au grand public mais aussi aux chercheurs et amateurs d’histoire de l’art. Une plongée sensible dans le parcours d’un créateur libre, dont l’inspiration était nourrie aussi bien par les ruelles vibrantes de la Médina que par ses nombreux voyages à l’étranger : France, Belgique, Suisse, Pays-Bas, États-Unis…
Du « vif » et non plus du « naïf »
Considéré comme l’un des peintres tunisiens les plus originaux, Hamadi Ben Saâd était une figure lumineuse de la médina et du centre-ville de Tunis, et de la scène artistique tunisienne, laissant derrière lui une œuvre marquée par la liberté, l’intuition et une forte dimension sensorielle.
Artiste autodidacte né à Tunis en 1948, il a toujours revendiqué un art « vif » plutôt que « naïf », refusant les étiquettes et les catégories figées. Il a développé, depuis 1966, une pratique personnelle mêlant peinture, collage, papiers recyclés, toiles, journaux, superposant les matières pour créer un langage visuel singulier, entre figuration et abstraction. Ses célèbres séries – comme celle des « têtes empilées » – témoignent de cette dualité constante entre le réel et l’imaginaire.
Il puise son inspiration dans le tumulte de la Médina de Tunis, les couleurs des saisons, les lumières mouvantes de la nature, comme dans ses nombreux séjours à l’étranger dans le cadre des résidences artistiques.
Son œuvre a été exposée à de nombreuses reprises, à Tunis (Galeries Selma Feriani, Aicha Gorgi, Jaou Tunis) comme à l’international, où elle a su marquer par sa force et son authenticité.
Deux ans avant sa disparition, en 2023, le réalisateur Moez Kammoun lui a consacré un court-métrage documentaire de 25 minutes, «Hammadi Ben Saâd – L’art au-delà de la Médina», où plusieurs artistes tunisiens témoignent de son influence et de son apport. L’artiste y affirmait : «Mes tableaux sont mes enfants. Le préféré de tous ? C’est toujours le tableau futur que je compte faire».
Plus qu’une simple exposition, cet hommage est pensé comme une rencontre familiale et artistique, un moment de transmission et de mémoire pour célébrer un artiste inclassable, profondément ancré dans son temps, et dont l’œuvre continue de parler à tous.
Imen ABDERRAHMANI
Légende : Hamadi Ben Saâd : une œuvre en écho de la vie