Trente maisons d’édition représentant 17 pays ainsi que des institutions publiques et des acteurs et professionnels du secteur du livre du monde arabe et de la francophonie prennent part au lancement de « la Cartographie des politiques publiques du livre dans le monde arabe » qui a eu lieu, hier, le mardi 24 juin, à Tunis.
Organisé du 23 au 27 juin, cet événement se tient à l’initiative de l’Alliance internationale de l'édition indépendante (AIEI), en partenariat notamment avec le ministère des Affaires culturelles, de l’Alecso et de l’OIF.
La cartographie des politiques publiques du livre dans le monde arabe est présentée par Samar Haddad (Atlas Publishing, Syrie), coordinatrice de ce projet pour le monde arabe et du réseau arabophone de l’Alliance, ainsi que par Hani Altelfah, auteur de l’étude. La cartographie a pour objectifs notamment de mettre à disposition des données sur les politiques publiques du livre dans les pays concernés, de favoriser le dialogue et le échanges entre les éditeurs et les institutions et de renforcer la circulation des livres et des idées.
Palestine, des mots et des maux
En solidarité avec les éditeurs palestiniens, empêchés de prendre part à cet évènement en raison de la guerre dans les Territoires occupés, certains représentants de maisons d'édition, réunis dans le cadre de la rencontre professionnelle de ce lundi 23 juin, ont mis à la disposition du reste des éditeurs présents à Tunis une collection de livres d'auteurs palestiniens ou autour de la question palestinienne. Le but étant d'échanger les droits de traduction et de publication ou de réédition.
L’éditeur Yéménite Saleh Salem de « Anaouine Kotob » (titres de livres), une maison née pendant la crise sanitaire de 2020, a présenté « Un pays appelé Jabalia » roman de l'écrivain palestinien Hassan Hamid en vue de sa réédition ou bien sa traduction, sans aucune condition.
Ce roman en arabe est l’histoire d'un directeur d'hôpital à Gaza, le fameux Hopital al-Shifa dans le nord de la Bande dont le bâtiment et les équipements ont été lourdement endommagés quelques mois après le début de la guerre du 07 octobre 2023. Cet opus retrace le calvaire des habitants de la Bande qui continue depuis une quinzaine d'années, bien avant le début de la guerre dans la Bande assiégée.
Son ce livre autobiographique, l’auteur natif de Beit Jala qui a passé une partie de sa vie de pays en pays avant de revenir à Ramallah en 1994, s'exprime sur les questions suivantes: « Comment répondre à une injonction brusque : « Définissez la poésie », « Prose et poésie, la distinction a-t-elle un sens? », « De la forme (et du formel) en temps de crise », « Quel avenir pour la poésie ? », « La part de la prosodie dans l’élaboration du poème » et « La place de la traduction dans l’écriture poétique ».
Le représentant de Dar Jadal books d’Arabie Saoudite, Nawaf Farhan al Ayyashi, a présenté deux livres en arabe: « Portrait collectif d’une femme » de l’autrice palestinienne Amal Ismail et « Le coffre-fort » d'Ismat Mansour, ancien prisonnier palestinien dans les geôles de l'occupant.
Dans le même contexte, l’Egyptienne Dina qabbel (Dar Al-Maraya) a présenté trois livres: « Taupe noire sous le cou » de Jihad al Rantisi, « Questions palestiniennes d'aujourd'hui » de Jamal Abdelfattah et le 23ème numéro du magazine « Maraya » autour du thème « Comment libérer la Palestine? ».
Sa compatriote Fatma al Boudi (éditions Al Aïn) a présenté « Mon ami ou tout autre titre » de la Palestinienne Mira Emad Krayem, un livre qui « reflète la perplexité des Palestiniens vivant dans divers pays arabes ».
L’éditeur égyptien, Mohammed Baali (éd. Safsafa) a présenté « La triste saison des papillons » du romancier et cinéaste indépendant palestinien Oussama Habshi édité pour la première fois en 2010. Ce roman redessine les contours de la question palestinienne à l'issue de Nakba de 1948 marquée par le déplacement forcé de milliers de Palestiniens de leurs villages vers des camps dans l'espoir d'y revenir un jour.
Ces œuvres palestiniennes à promouvoir
L’éditeur algérien Karim Cheikh (éditions APIC) a présenté la version française de « Chants et hymnes » traduction d'un recueil en arabe du poète et journaliste palestinien Ghassan Zaqtan parue dans la Collection poèmes du monde (128 pages, mars 2019).
Pour sa part, l’éditrice et journaliste marocaine Kenza Sifrioui, cofondatrice de « En toutes lettres », a présenté un livre collectif en français intitulé « Les droits culturels à l'œuvre, la personne au cœur » (novembre 2024). Ce livre de 356 pages défend le droit à la reconnaissance des cultures endogènes et les patrimoines intérieurs dont chacun est porteur dans de complémentaires et fertiles dialogues entre les enjeux de démocratisation et de citoyenneté culturelles pour mieux faire humanité.
Sa compatriote Safa Wali de House of Funk a présenté la version arabe de « Souvenirs de Jérusalem » une biographie de Sirine Husseini Shahid parue en janvier 2025 chez le Fennec, et « Je ne partirai pas, mon histoire est celle de la Palestine » de Mohamed El Sabaaneh (éditions Alifbata).
Dans « Souvenirs de Jérusalem », traduction d’un livre en français paru chez Bayard en janvier 2005, Sirine Husseini Shahid brosse le portrait d’une famille palestinienne, la sienne, installée à Jérusalem depuis plusieurs siècles et contrainte en 1936 de prendre la route de l’exil pour se réfugier à Beyrouth. Le livre de Sirine Husseini Shahid est un trésor historique et humain. [...] C’est un témoignage intime, sans doute, mais c’est également de la littérature – familière, humaine, sincère, généreuse et éloquente.», peut -on lire dans le résumé de l'ouvrage signé Edward Said.
« Je ne partirai pas, mon histoire est celle de la Palestine » est une bande dessinée en noir et blanc illustrant la résistance des Palestiniens dans un espace contraint, leur espérance et leur refus de partir…
La Tunisienne Selma Haddad (Dar Al-Kitab) a proposé « Masque de la couleur du ciel » de Bassem khondaqji, ancien prisonnier palestinien et auteur de plusieurs livres dont des essais et recueils de poésie. Ce livre écrit lors de sa détention dans les prisons de l'occupant avant de s'évader ce qui lui a valu de remporter le « Booker du roman arabe » pour l'année 2024.
La Tunisienne Mouna Ben Salem (Mohammed Ali Editions) a présenté deux romans en arabe « Habibati milichia » du Palestinien Taoufik Fayyad paru en 1979 et « Falsafat al ahwaa bayna al kardh wattakridh » de l'autrice tunisienne Tajah Bou Hajja ben Ali.
Faisant partie de la première génération d’écrivains palestiniens, Taoufik Fayyad a été déporté par les autorités de l'occupant vers l’Égypte en 1974 pour ensuite rejoindre la Tunisie en 1984. « Habibati milichia » fait partie des quatre romans publiés en Tunisie de cet écrivain contemporain d'éminents auteurs comme les poètes Mahmoud Darwich et Samih al Qâcim.
Ces rencontres sur la Cartographie des politiques publiques du livre dans le monde arabe sont consacrées aux partenariats éditoriaux solidaires entre maisons d’édition arabes et francophones, avec un accent particulier mis sur les ouvrages consacrés à la Palestine ou publiés par des éditeurs palestiniens. Des ateliers autour de l’intelligence artificielle et de la bibliodiversité sont également au programme.
Le Quotidien avec TAP