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Les Tunisiens face aux dépenses du Mouled et de la rentrée : L’art, difficile, de jongler avec le budget

Par Hassan GHEDIRI

Sous un ciel gris rappelant que l’automne a officiellement débuté samedi, les rues marchandes de Tunis grouillent de monde et vibrent au rythme de la rentrée et de la fête du Mouled….


Sous le regard indifférent des policiers positionnés au croisement de la rue Jamel Abdennaceur et rue Charles de Gaulle, des vendeurs à la criée exposent sur des étals de fortune des cahiers et des fournitures scolaires qui ne manquent pas d’attirer les foules. Depuis plusieurs mois, les autorités avaient pourtant décrété l’interdiction de l’occupation des rues par les marchands ambulants. Une dérogation semblait alors être accordée à l’occasion de la rentrée des classes fixée pour le 15 septembre. Bon nombre de Tunisiens préféraient néanmoins se concentrer pour le moment sur les dépenses du Mouled. Il faut dire que la commémoration de la naissance du Prophète, qui aura lieu demain 4 septembre, demeure un évènement incontournable et ce malgré les difficultés que trouvent les ménages tunisiens à joindre les deux bouts à cause de la hausse généralisée des prix et de la dégradation du pouvoir d’achat. Un évènement historiquement et traditionnellement célébré par la préparation du fameux plat de l’assida de Zgougou. Une recette cent pour cent tunisienne qui coûte malheureusement de plus en plus cher. Car, outre des graines de Zgougou, ces minuscules graines de pin d’Alep essentielles pour la préparation du plat et qui ont vu leur prix atteindre un niveau astronomique, tous les autres ingrédients sont devenus hors de portée de beaucoup de familles.
Dans les commerces dédiés aux fruits secs qui ont pignon sur rue dans les artères marchandes environnant le marché central de Tunis, l’ambiance est exceptionnelle. Malgré les prix affichés qui donnent le tournis, l’affluence est au rendez-vous. Rue d’Espagne, il faut jouer des coudes pour se frayer un chemin dans la foule, essentiellement féminine, qui a pris d’assaut ce magasin où l’on vend tout ce qu’il faut pour préparer et décorer ces assiettes de Zgougou. Exposées dans un énorme récipient en verre, les graines de pin d’Alep ne semblent pas choquer les clients qui font la queue devant les étals surchargés de toutes sortes de fruits secs, en attente d’être servis par trois ouvrières qui ne savent plus où donner de la tête. « 50 dinars le kilo, c’est comme on l’avait importé du Canada », a commenté une femme sexagénaire qui trouve complètement aberrant qu’un produit cultivé en Tunisie se vend à un tel prix sans que cela suscite aucune réaction de la part des autorités.

Marquer le coup !
La plupart des clients optent toutefois pour le Zgougou moulu vendu sous forme de pâte prête à utiliser dans des boîtes de 500 grammes. Supposé être plus économique et plus facile à préparer, cet article reste quand même exorbitant puisque le kilo coûte 60 dinars. En ajoutant les autres ingrédients de la recette, le plat pourrait facilement dépasser les 100 dinars pour un ménage moyen. Pour de nombreux parents, la priorité reste cependant la rentrée scolaire. « On ne peut pas se permettre le luxe de dépenser sans compter », explique Mohamed, fonctionnaire, la quarantaine, rencontré dans la rue d’Espagne. Ayant à charge deux enfants qui ont besoin de cartables, de cahiers et de tenues scolaires, il dit essayer de jongler comme il peut pour faire plaisir aux petits en préparant une quantité réduite de Zgougou, « juste pour marquer le coup ». A l’instar de beaucoup de Tunisiens, le budget de septembre est dédié à la rentrée. Même constat chez Amira, mère de trois enfants, qui nous a confié sa détresse face à la hausse généralisée des prix : « Les fournitures sont devenues hors de prix, sans parler des cahiers qui restent chers malgré les remises déclarées dans les boutiques. « Pour m’en sortir, je fais des choix douloureux : je réduis les achats de vêtements, je négocie chaque prix au souk et je privilégie ce qui est indispensable pour la rentrée. » En même temps, cette mère qui évite que ce genre de fêtes ne deviennent un fardeau supplémentaire, tache quand même à prépare une petite assida symbolique, mais sans exagérer. » Ainsi, entre les traditions profondément ancrées et obligations de dépenses liées à la rentrée des classes, les ménages tunisiens se trouvent obligés de jongler avec des budgets de plus en plus serrés.

H.G.

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