Par Myriam BEN SALEM-MISSAOUI
L’adoption de la loi portant sur la suppression de la sous-traitance a provoqué une vague de licenciements dans le secteur du tourisme. D’autres secteurs sont également menacés. Que faire pour rassurer les employeurs et garantir les droits des employés?
Dans une déclaration à Echaâb News, relayée par Business news, le secrétaire général adjoint de la Fédération générale du tourisme, de l’artisanat et du commerce (UGTT), Mohamed Baraketi, a indiqué qu’«une vague importante de licenciements a récemment touché le secteur du tourisme». Selon M. Baraketi, dans une déclaration à Echaâb News, plusieurs régions et établissements hôteliers sont concernés. Ces licenciements auraient été décidés en prévision des amendements attendus du Code du travail, notamment en ce qui concerne les contrats et la titularisation des employés.
À Sousse, entre 400 et 500 employés d’hôtels ont ainsi été remerciés dès le début des discussions autour de ces amendements, avant même leur adoption par l’Assemblée des représentants du peuple (ARP). Les employeurs auraient anticipé les nouvelles règles en écartant les travailleurs non titularisés. Le même phénomène a été constaté à Médenine et Djerba, avec environ 250 licenciements, ainsi qu’à Nabeul, où entre 400 et 500 travailleurs ont également perdu leur emploi.
Face à cette situation, Mohamed Baraketi a appelé le ministère des Affaires sociales et les inspections du travail à réagir en publiant un communiqué officiel. Il a insisté sur l’urgence d’une intervention, estimant que plusieurs établissements cherchent à éviter la régularisation de leurs contractuels avant l’entrée en vigueur du nouveau Code du travail. Selon, par ailleurs, plusieurs observateurs, la même tendance pourrait affecter d’autres secteurs. D’ores et déjà, l’Union générale tunisienne du travail s’est, par le biais, attaquée au gouvernement lui reprochant d’avoir élaboré l’amendement du code du travail unilatéralement et sans consultation préalable des partenaires sociaux, notamment du Conseil national du dialogue. «Le projet a été préparé sans consultation de la partie sociale la plus représentative des travailleurs», peut-ton lire dans ce communiqué. Que faire, de fait, pour rassurer les employeurs et garantir les droits des employés?
Exceptions…
Interrogé à ce sujet, l’expert en économie et en finances, Mohamed Salah Jennadi, nous a déclaré: «Au vu de l’état de santé de notre économie et la vulnérabilité de la majorité des entreprises, la nouvelle loi portant sur la suppression de la sous-traitance pourrait aggraver davantage la situation et augmenter le taux de chômage, notamment dans les secteurs des services. L’on sait déjà que les 300 sociétés d’intérim en activité en Tunisie sont spécialisées dans le nettoyage et le gardiennage. Leurs clients sont en majorité des entreprises étatiques comme la Société tunisienne d’électricité et du gaz ou encore la Société nationale de distribution des eaux. Alors, c’est l’Etat qui devrait récupérer et titulariser ces employés embauchés en sous-traitance par ces sociétés d’intérim». Et d’ajouter : «Il faudrait peut-être alors faire des exceptions en épargnant certains secteurs comme le tourisme ou l’agriculture voire le bâtiment. Dans ce cas-là, l’’intérim peut, en effet, jouer un rôle important pour aider les entreprises à redémarrer pleinement leur activité en les rassurant et en leur proposant une approche à la fois dynamique et maîtrisée. De nombreuses entreprises risquent en effet de faire preuve de prudence et décaler des recrutements nécessaires à leur bon fonctionnement. Il faut rappeler aussi que l’intérim joue ainsi un rôle d’amortisseur dans un contexte de conjoncture économique difficile, mais aussi de filtre de sélection de la main-d’œuvre avant la phase d’embauche lors d’une situation économique plus favorable. En contrepartie, le législateur pourrait promulguer des lois de nature à protéger les droits employés intérimaires».
M.B.S.M.