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Editorial : Y a pas photo…

Par Chokri Baccouche

La question palestinienne est très certainement l’un des sujets qui fâchent les responsables de l’administration américaine, particulièrement lorsque ces derniers effectuent une visite dans tel ou tel pays arabe. C’est la raison pour laquelle d’ailleurs la plupart des dirigeants arabes évitent généralement d’évoquer ce sujet, se contentant dans le meilleur des cas de  glisser quelques doléances juste pour marquer le coup et ne pas froisser le tempo de leur hôte. Au palais de Carthage en revanche, comme ce fut le cas mercredi dernier, l’émissaire du président américain, qui a été reçu en audience par Kaïs Saïed, a dû boire, à contre cœur, la coupe du drame palestinien jusqu’à la lie. Le président tunisien a tenu, en effet, entre deux propos protocolaires, à montrer à son hôte une série de photos d’enfants gazaouis crevant de faim. Les clichés racontent la tragédie palestinienne et ont valeur de message sans ambages. Un message politico-humanitaire ayant pour objectif de choquer délibérément l’hôte américain et de mettre les Etats-Unis face à leurs responsabilités en tant que superpuissance qui se veut la gardienne du temple des libertés et de la démocratie, mais qui se distingue en réalité par sa politique inique des deux poids deux mesures et son inamovible parti pris en faveur de l’occupant sioniste.
En montrant ces photos, le chef de l’Etat a tenu à rappeler aux bons soins de l’émissaire américain les constantes de la politique étrangère de la Tunisie ainsi que les principes sur lesquels repose la diplomatie tunisienne depuis l’aube de l’indépendance du pays. Des principes immuables ayant pour noms droit des peuples à l’autodétermination, résolution des conflits et des différends entre les pays par la voie politique, cohabitation pacifique entre les peuples, les cultures et les religions et, surtout, surtout le strict respect de la légalité, des conventions et du droit international. Bref, tous les grands principes communément admis par la communauté internationale tels que codifiés par la Charte des Nations unies. Kaïs Saïed a également mis l’accent lors de cette rencontre sur la question de la souveraineté des Etats qui implique le refus catégorique de toute ingérence étrangère et le respect de la volonté des peuples et de leurs libres choix.
Quel est le but de cette visite officielle effectuée dans nos murs par M. Massad Boulos, conseiller spécial du président Trump pour l’Afrique, le monde arabe et le Moyen-Orient ? Qu’attendent au juste les Américains de Kaïs Saïed ? La question portant sur la normalisation des relations avec Israël, un sujet qui tient à cœur le président américain, est-elle à l’ordre du jour de cette mission ? Rien d’officiel n’a filtré à ce sujet. L’envoyé spécial du locataire de la Maison Blanche s’est d’ailleurs contenté d’une déclaration laconique à portée générale en s’empêchant d’évoquer les sujets réellement discutés au Palais de Carthage. A l’issue de cette rencontre et ce qui est sûr en tout cas, c’est que M. Massad Boulos dispose de toutes les informations nécessaires lui permettant d’établir un rapport édifiant et exhaustif qu’il va certainement soumettre à l’attention de son mandataire. Si ce rapport est rédigé avec objectivité, il mettra en exergue la disposition de la Tunisie à renforcer ses relations avec les Etats-Unis et à élargir les domaines de coopération bilatérale dans le cadre du respect mutuel et dans l’intérêt bien compris des deux pays. Les images montrées par Kaïs Saïed à son hôte parlent d’elles-mêmes en revanche et reflètent à bien des égards la position immuable de la Tunisie concernant la cause palestinienne. Une position fondée sur la légalité internationale qui résonne avec une force particulière au sein de la nation tunisienne tout entière. Plus qu’une simple solidarité, c’est un engagement profond et constant qui a marqué l’histoire du pays, se manifestant à travers des actions politiques, diplomatiques et populaires. Bref, la Tunisie ne pourra, en aucun cas, se départir de son engagement historique et inébranlable envers la cause des Palestiniens qu’elle considère, à juste titre, non seulement comme une cause juste et centrale pour le monde arabe, mais aussi pour la justice et la liberté à l’échelle internationale. La Tunisie maintient une position ferme en faveur de la solution à deux États, basée sur les frontières de 1967, et s’oppose à toute tentative de normalisation ou de marginalisation de la question palestinienne. L’histoire retiendra cette position courageuse et responsable de la Tunisie qui défend ses principes avec dignité au moment où d’autres dirigeants arabes, par crainte de représailles politiques ou tout simplement par opportunisme et petits calculs mesquins, font profil bas et tournent le dos aux souffrances du peuple palestinien. La reconnaissance du droit inaliénable des Palestiniens à un Etat indépendant et souverain sur la base des résolutions onusiennes est un impératif incontournable et indiscutable en vue d’une résolution durable du conflit israélo-palestinien. La position de la Tunisie n’est, en définitive, que l’écho des voix libres qui résonnent avec force et vigueur aux quatre coins de la planète appelant à un arrêt immédiat de la sordide et effroyable guerre à Gaza dont les victimes civiles, principalement des enfants, se comptent par milliers…

                                                                                                                                            C.B.

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