Par Myriam BEN SALEM-MISSAOUI
Le chef de l’Etat appelle à ancrer les bases de l’Etat social dont le premier objectif est de réduire le taux du chômage. Le secteur public a-t-il justement les moyens de recruter?
«L’État social n’est pas qu’un simple slogan, mais il doit se concrétiser dans tous les secteurs et toutes les régions. Il s’agit d’une véritable révolution de libération nationale jusqu’à la victoire», a affirmé le président de la République, Kais Saied, lors du Conseil des ministres tenu vendredi dernier. Et c’est le chômage qui est dans le collimateur du chef de l’Etat. «Le plus grand défi auquel nous sommes confrontés est d'ouvrir la voie aux chômeurs, dont notamment les jeunes. Ils sont les victimes de plusieurs décennies de corruption et de mauvais choix économiques. Il faut d'abord se débarrasser des concepts caducs et trouver de nouvelles solutions pour créer la richesse», a-t-il indiqué. En effet, Kaïs Saied a ordonné au cours de ce Conseil des ministres l’élaboration d’un projet de loi relatif aux personnes au chômage depuis de longues années. Ce projet de loi vise à ouvrir la voix vers des perspectives de recrutement, notamment dans la fonction publique.
De fait, plusieurs observateurs s’interrogent si réellement l’Etat a les moyens de sa politique d’autant que le secteur public engloutit pas moins de 60% du PIB et le nombre d’employés dépasse largement les normes internationales. Pis encore, les recrutements massifs survenus après la révolution de 2011 ont lourdement affecté ce secteur devenu un lourd fardeau pour l‘Etat. «La masse salariale a atteint environ 23,7 milliards de dinars en 2024, en hausse par rapport aux 22,7 milliards de dinars en 2023, ce qui soulève des préoccupations quant à la lourdeur pour l’Etat de financer d’autres dépenses essentielles, telles que les infrastructures et les équipements publics», nous apprend l’expert en économie et en finances, Mohamed Salah Jennadi. Que faire, de fait, pour rendre le secteur public plus compétitif aussi bien au niveau social qu’économique ?
Réformes tous azimuts…
Tous les spécialistes s’accordent à dire que l’Etat social doit rompre avec le concept de l’Etat providence, «l’ambition est de placer la gestion des ressources humaines des administrations publiques au cœur de la performance du service public», affirme l’expert en économie et en finances, Mohamed Salah Jennadi. Et d’ajouter : «Il faut éviter l’erreur commise par les différents gouvernements ayant siégé après la révolution en recrutant sur la base du militantisme et pour des raisons partisanes. L’impact de cette politique a lourdement affecté les grandes entreprises publiques qui sont aujourd’hui les plus importantes en termes de masse salariale. Je cite la Société Tunisienne de l’Électricité et du Gaz (STEG), Tunisie Télécom, la Compagnie des Phosphates de Gafsa (CPG) et le Groupe Chimique et TRANSTU. Ces entreprises représentent 66% de la masse salariale totale des 88 établissements publics concernés par le dernier rapport du ministère des Finances sur les entreprises publiques. De fait, il faut repenser notre politique en matière de gestion des ressources humaines. Tous les experts vous le diront : la gestion des ressources humaines doit, en effet, s’articuler autour de quatre points principaux, à savoir le recrutement qui vise à cibler les besoins présents de l’entreprise et rechercher des talents individuels capables de les satisfaire et de s’adapter aux besoins futurs de l’entreprise, la maîtrise des rémunérations qui comprend entre autres la motivation par le salaire, c'est-à-dire récompenser les plus motivés, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences afin de prévoir et adapter le personnel selon les besoins de l’entreprise dans un environnement fluctuant et instable et l’amélioration des conditions de travail, car la productivité du capital humain assure la performance de l’entreprise en gérant bien le facteur motivation et stress du personnel ».
M.B.S.M.