Lors du Conseil ministériel présidé samedi dernier par la cheffe du gouvernement, Mme Sarra Zaâfrani Zenzeri, ont été dévoilés les grands axes d’un nouveau programme économique et social adopté par l’Etat. Inspiré, dit-on, de la «vision du président de la république», ce programme se veut très ambitieux. Il vise à concilier croissance économique et justice sociale, renforcer la souveraineté nationale, valoriser le capital humain et dynamiser le développement régional. Derrière cette déclaration d’intention, une interrogation principale reste toutefois en suspens en ce qui concerne la manière par laquelle l’on pourrait juger de la réussite ou de l’échec de ce programme. A cette question fondamentale, il y a une réponse claire, simple, concise et unique: par des objectifs clairs, quantifiables cadrés par un calendrier précis et guidés par un dispositif d’évaluation rigoureux. C’est en respectant cette exigence, et elle seule, qu’un gouvernement est estimé posséder et mettre en œuvre un plan d’actions sérieux et non pas juste brandir des slogans politiques sans aucune suite.
Un programme économique et social, aussi complet et cohérent soit-il, ne peut être jugé crédible s’il ne vise pas des ambitions chiffrées. Dire que l’on souhaite «réduire le chômage», «améliorer le pouvoir d’achat», «renforcer la protection sociale» ou encore «numériser l’administration» est une chose. Dire COMBIEN, COMMENT et dans quels DELAIS en est une autre. Car c’est justement grâce à cette précision que les citoyens, c’est-à-dire le peuple (placé au cœur du modèle politique institué par Kaïs Saïed), sont capables d’évaluer l’action publique et d’identifier les réussites comme les manquements; et par le même fait demander des comptes en connaissance de cause.
La reddition des comptes n’est pas un luxe que les gouvernés hésitent timidement à réclamer aux gouvernants. Cela relève, en effet, des droits essentiels dont disposent les gouvernés supposés vivre dans un Etat de droit et que les gouvernants doivent faire prévaloir. Ceci dit, la reddition des comptes suppose une planification rigoureuse des actions à accomplir avec des indicateurs de performance qui sont régulièrement communiqués et constamment mis à jour. Elle exige également du gouvernement, c’est-à-dire l’ensemble des responsables chargés de l’exécution des politiques publiques, de se soumettre à l’évaluation et d’assumer les résultats du programme. Sans cette démarche, nous demeurerons dans une gouvernance inféconde qui ne fait que mâcher les slogans et multiplier les promesses qui ne seront jamais tenues. D’après le communiqué diffusé samedi, la présidence du gouvernement exprime son intention de mettre en place des outils technologiques qui permettraient de suivre l’exécution des actions prévues dans ce programme économique et social. Ceci est une bonne chose, mais encore faut-il que ce «mécanisme» de suivi soit tangible et concret à même que les spécialistes du domaine peuvent en juger la performance. Trop souvent, un flou absolu plane sur l’exécution des politiques publiques avec une communication officielle se limitant à des communiqués statiques que l’on diffuse machinalement sur les réseaux sociaux des ministères et de la présidence du gouvernement. Une communication qui, à première vue, est dans l’ère du temps, mais qui cache à peine une volonté de se contenter du minimum syndical. Un gouvernement qui se respecte (et qui respecte les contribuables) se doit de communiquer le plus clairement possible sur toutes ses actions. Cela implique la production et la publication des rapports exhaustifs, la tenue des conférences de presse voire l’organisation de dialogues avec les citoyens notamment les jeunes, autour des vraies priorités nationales lors desquelles des comptes sont rendus. La transparence ne fragilise pas un gouvernement mas renforce sa crédibilité et légitime ses choix. En fait, le programme économique et social porté par le gouvernement est assez prometteur. Il couvre tous les secteurs, du social à l’industrie, en passant par l’éducation, la santé, l’énergie et la culture. Mais comment compte-t-on faire pour le réussir? That’s the question!
H.G.