Par Hassan GHEDIRI
Briser l’interminable chaine d’intermédiaires qui gonflent les prix et prennent en otage les consommateurs, tel est l’objectif inavoué de cette initiative…
Demain, au siège de l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche (UTAP) sis à la Cité El Khadhra à Tunis, sera ouvert le premier «marché du paysan» en Tunisie qui sera par la suite dupliqué à travers la création d’autres marchés dans toutes les régions du pays. Le concept est nouveau bien qu’il rappelle la fameuse expérience des points de vente du producteur au consommateur aménagés chaque année à l’occasion du mois de ramadan à Tunis et dans beaucoup de villes par l’Office des terres domaniales. Le «marché du paysan» a émergé en Italie et est aujourd’hui très en vogue aux quatre coins de la planète. Fruit d’un partenariat avec la coalition internationale des marchés paysans (World Farmers Market Coalition- WFMC) basée en Italie, l’UTAP vise par ce projet à faire prévaloir les intérêts des producteurs agricoles en leur permettant de mieux valoriser leurs produits et se réapproprier une partie de la valeur ajoutée de leur production en s’adressant directement au consommateur. De l’autre côté, «le marché du paysan» répond à une demande de plus en plus croissante en produits frais, particulièrement dans les villes. En Italie, en France et dans beaucoup d’autres pays où ont pu être développés de cette forme innovante de commercialisation, les consommateurs ont tendance à fuir les commerces conventionnels dans lesquels les produits sont rendus complètement hors de portée par la multiplicité des intermédiaires, pour s’approvisionner dans les marchés paysans qui vendent des produits de saison frais à des prix abordables.
En espérant créer un réseau durable de marchés paysans dans toutes les régions, l’UTAP n’a pas caché de souligner dans un communiqué diffusé à cet effet qu’elle œuvre pour permettre aux agriculteurs et aux pêcheurs de vendre leurs produits à leur juste prix, sans intermédiaires. Il est aussi question de soutenir les efforts de l’Etat pour une meilleure rationalisation «des circuits de distribution» sur lesquels le président de la république ne cesse de tirer à boulets rouges.
C’est donc demain qu’ouvrira au public le premier marché paysan dans les locaux de l’UTAP à Tunis. Un événement auquel doivent prendre part les ministres chargés de l’agriculture et du commerce ainsi que l’ambassadeur de l’Italie en Tunisie. Il faut dire que l’Italie accompagne depuis deux ans notre pays dans l’élaboration du guide de bonnes pratiques pour la mise en place des marchés paysans. Il s’agit d’un cahier des charges qui régit la création, la gestion et la pérennisation des marchés paysans. En 2023, lors d’une conférence organisée à Tunis sur le rôle des marchés paysans dans la garantie d’un système alimentaire local. M. Carmelo Troccoli, le secrétaire général de la coalition internationale des marchés paysans (WFMC), s’est engagé à accompagner notre pays dans la mise en place d’un système de marchés paysans. Il avait estimé que la Tunisie a tous les atouts qui permettent de créer un réseau de marchés paysans favorisant un modèle de consommation plus sain pour le consommateur et qui aide les agriculteurs à améliorer leurs revenus en évitant l’interminable chaine d’intermédiaires. Grâce à la coalition créée après la pandémie du Covid qui a fait des ravages dans la péninsule, l’Italie a pu se doter d’un réseau de plus de 1200 marchés paysans tous placés sous le label «Campagna Amica» (campagne amicale), une fondation créée en 2008 pour défendre les agriculteurs italiens.
H.G.