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Éditorial : Comédie humaine - Par Jalel HAMROUNI

Depuis des mois, les bombes pleuvent sur la bande de Gaza, réduisant en poussière des quartiers entiers, transformant écoles et hôpitaux en cibles militaires, et condamnant plus de deux millions de Palestiniens à une existence marquée par la peur, la faim et l’exil forcé. Derrière les prétextes sécuritaires brandis par l’entité sioniste, se dessine désormais au grand jour un plan précis et cynique: occuper Gaza, l’annexer de facto, et effacer toute possibilité d’un avenir palestinien libre sur cette terre.
Ce projet, qui n’a rien de nouveau, s’inscrit dans une logique coloniale vieille de plus de soixante-quinze ans. La bande de Gaza, déjà assiégée depuis 2007, est aujourd’hui victime d’une offensive qui vise bien plus que la neutralisation d’une résistance armée: elle cherche à briser la volonté d’un peuple, à le vider de sa population par la terreur, la famine et l’exode forcé. Les déclarations récentes de plusieurs responsables sionistes, appelant à «réinstaller» Gaza avec des colonies et à «réorganiser» la démographie locale, ne laissent plus de place au doute.
Il s’agit là d’un nettoyage ethnique planifié. Chaque jour, les images et témoignages qui filtrent de l’enclave rappellent les pires pages de l’histoire humaine: enfants errant parmi les décombres à la recherche de leurs parents, vieillards affamés, blessés, mourants faute de soins, et colonnes de familles entières forcées de marcher vers un sud déjà saturé et sans refuge. Cette tragédie est vécue en direct par la planète entière, et pourtant, la communauté internationale semble figée dans un mutisme coupable.
L’ONU se contente de résolutions non contraignantes et de déclarations creuses. Les grandes puissances occidentales, qui aiment se présenter comme les garantes des droits humains, jouent une partition hypocrite: elles condamnent mollement les «excès» tout en continuant d’armer et de soutenir l’occupant. Quant aux pays arabes, ils oscillent entre indignation de façade et calculs géopolitiques, laissant les Palestiniens seuls face à leur destin. Cette inertie n’est pas seulement une trahison morale, c’est une complicité.
Car Gaza n’est pas qu’une question régionale, c’est un test pour l’humanité toute entière. Tolérer qu’un peuple soit ainsi dépossédé, affamé et massacré sous les yeux du monde, c’est accepter que le droit international ne soit qu’un outil à géométrie variable, utilisé uniquement lorsque les intérêts des puissants le permettent. C’est transformer la déclaration universelle des droits de l’homme en une simple vitrine diplomatique, vidée de tous sens.
Il est temps de cesser cette comédie humaine où l’on prétend «œuvrer pour la paix» tout en tolérant, voire en facilitant, l’expansion coloniale et l’occupation militaire. La paix ne naîtra jamais sur les ruines d’une population affamée et exilée. Elle exige d’abord que cesse l’agression, que soit levé le blocus inhumain, et que les Palestiniens puissent vivre libres sur leur terre, avec des frontières reconnues et la pleine maîtrise de leurs ressources.
La communauté internationale ne peut plus se cacher derrière l’argument stérile de «la complexité du conflit». Elle dispose de moyens concrets pour agir: sanctions économiques, embargo sur les armes, reconnaissance immédiate de l’État palestinien dans ses frontières de 1967, et saisine de la Cour pénale internationale pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité. Ces mesures, si elles étaient appliquées avec détermination, feraient rapidement comprendre à l’occupant que la loi du plus fort ne saurait prévaloir indéfiniment.
Il ne s’agit pas seulement d’un devoir de solidarité envers les Palestiniens, mais aussi d’un impératif pour la stabilité mondiale. Car l’injustice prolongée nourrit les extrémismes, fracture les sociétés, et mine l’idée même d’un ordre international fondé sur des règles. En laissant Gaza tomber sous occupation totale, le monde envoie un message dangereux: certaines vies valent moins que d’autres, et certains peuples peuvent être effacés sans conséquence.
Mais il est encore temps de changer le cours des choses. Les peuples, par leur mobilisation, peuvent contraindre leurs gouvernements à rompre le cercle vicieux de l’inaction.
Les organisations de la société civile, les mouvements de solidarité, les voix libres dans les médias doivent redoubler d’efforts pour briser le mur du silence et rappeler que Gaza n’est pas une zone abstraite de conflit, mais une communauté humaine en danger de mort.
Les Palestiniens de Gaza ne demandent pas la pitié: ils réclament justice, dignité et liberté. Il appartient au reste du monde de répondre à cet appel, non par des discours creux, mais par des actes fermes. Tant que l’occupation et la colonisation seront tolérées, il ne pourra y avoir de paix véritable. Et tant que cette comédie humaine continuera, c’est l’honneur même de l’humanité qui restera sali.

J.H.

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