L’information a récemment occupé les premiers titres de l’actualité high-tech en Tunisie. D’après un rapport publié par l’entreprise technologique kenyane Qhala, spécialisée dans l’accélération de la transformation numérique en Afrique, la Tunisie se classe à la deuxième place dans un index évaluant la préparation de 54 pays africains en matière de formation et valorisation des compétences en intelligence artificielle (IA).
Ce classement, baptisé AI Talent Readiness Index (indice de préparation des talents en IA), repose sur un cadre d’évaluation conçu spécialement pour le continent africain. Selon cette étude, la Tunisie dispose de nombreux atouts qui peuvent lui permettre de jouer un rôle de premier plan dans le développement de l’IA à l’échelle continentale. Juste derrière l’Afrique du Sud, et à égalité avec l’Égypte, la Tunisie affiche de bonnes performances en matière de formation numérique et de préparation des infrastructures. Elle se distingue particulièrement par un taux élevé de développeurs dans le domaine de l’IA, atteignant 4.120 développeurs par million d’habitants, l’un des meilleurs ratios en Afrique.
La Tunisie, qui a lancé depuis 2020 sa Stratégie nationale pour l’intelligence artificielle et adopté une législation encadrant l’hébergement des données numériques (cloud computing) – un pilier clé de la transformation numérique – reste toutefois en retrait sur le plan de la gouvernance publique des opportunités offertes par l’IA. En effet, notre pays souffre de faiblesses dans la promotion de l’investissement et la qualité réglementaire, avec une efficacité gouvernementale jugée modérée, ce qui lui a valu des scores moyens dans l’indice de Qhala. Ce rapport s’inscrit dans une série d’évaluations internationales qui s’intéressent à l’intégration des pays dans la révolution numérique, portée aujourd’hui par une IA en plein essor. Dans plusieurs de ces classements, la Tunisie parvient à se hisser à des rangs honorables à l’échelle africaine.
Dans son Government AI Readiness Index 2024, l’agence britannique Oxford Insights, experte en politiques publiques et transformation numérique, a attribué à la Tunisie un score de 43,68 sur 100. Ce rapport, publié en début d’année, indique toutefois un recul de 11 places dans le classement mondial par rapport à l’année précédente. La gouvernance constitue ici le point faible du pays, avec un score de 28,6/100, le plus bas de ses composantes.
Quant à l’Agence française de développement (AFD), elle a récemment lancé son propre indicateur : l’Indice de potentiel d’investissement en intelligence artificielle (AIIPI). Destiné à guider les décideurs financiers et les gouvernements africains dans leurs stratégies d’investissement en IA, l’AIIPI attribue à la Tunisie un score supérieur à 53 sur 100 et la 7e place en Afrique dans sa première édition. L’AFD souligne que la Tunisie, à l’instar d’autres pays africains à fort potentiel, pourrait accroître considérablement son attractivité à travers la création de pôles locaux dédiés à l’IA (hubs IA), le renforcement des compétences numériques et la multiplication des partenariats internationaux.
Il ne fait désormais aucun doute que le monde a pleinement entamé la quatrième révolution industrielle, portée par l’intelligence artificielle qui transforme en profondeur l’économie mondiale. Malgré un potentiel humain prometteur, notamment en matière de compétences numériques, la Tunisie risque de rester en marge de cette révolution technologique, si elle ne parvient pas à surmonter une certaine frilosité politique que l’on perçoit clairement dans le discours officiel de l’État.
H.G.