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L’attaque israélienne contre l’Iran enflamme l’or noir : Les prix à la pompe reprendront-ils leur envol?

Par Hassan GHEDIRI

Le pétrole qui a été particulièrement bon marché ces derniers mois, faisant gagner plusieurs milliards de dinars aux caisses de l’Etat, laisse brusquement entrevoir des perspectives très inquiétantes.

Un bond de 13% du prix du baril de Brent a été constaté presque instantanément sur le marché mondial du pétrole quelques heures à peine après les frappes aériennes israéliennes d’une ampleur sans précédent qui ont visé, dans la nuit de jeudi à vendredi (12-13 juin) des sites militaires et nucléaires en Iran, l’un des plus grands producteurs de pétrole dans le monde. Dès les premières heures et alors que les bourses entament une chute en cascade, le pétrole s’est envolé sous l’effet de cette escalade avec des prix qui ont atteint leur plus haut niveau depuis plus de trois ans. Le Brent, référence internationale mais aussi principal indicateur par lequel sont déterminées les orientations du budget de l’Etat en Tunisie, a ainsi grimpé de 13%, vendredi, pour atteindre 78 dollars le baril. Une envolée inédite depuis le début de la guerre russe contre l’Ukraine au mois de mars 2022.
Cette offensive, à laquelle Téhéran n’a pas tardé de riposter à travers des salves de missiles balistiques qui ont causé beaucoup de dégâts dans des constructions à l’intérieur de Tel Aviv, entraine la région dans une nouvelle escalade et fait craindre un conflit massif. Malgré son rôle pas trop influant dans le club des grands producteurs mondiaux occupant la neuvième place avec environ 3,3 millions de barils par jour, c’est plutôt à cause de sa position géographique que l’Iran fait aujourd’hui trembler les marchés de l’or noir.
Téhéran, qui vient de perdre un nombre de ses plus hauts responsables militaires ainsi que plusieurs scientifiques nucléaires liquidés dans une série d’assassinats ciblés menés par l’armée israélienne, possède une autre arme stratégique qui est sa capacité de bloquer le détroit d’Ormuz, qui est l’une des plus importantes voies par laquelle sont acheminés chaque jour environ 20 millions de barils de pétrole. Les spécialistes du marché de pétrole pensent en effet qu’un blocage de cette voie suffit à lui seul de faire grimper le prix du baril à plus de 130 dollars.

Hausse généralisée
Pour l’année 2025, le gouvernement tunisien avait, rappelons-le, établi son budget sur la base d’un prix du baril de pétrole estimé à 77,4 dollars. Il faut dire que durant ces derniers mois, notre pays a pu profiter des prix particulièrement bon marché, surtout lorsque le Brent est passé sous la barre des 60 dollars au mois d’avril dernier, atteignant par le même fait son plus bas niveau depuis 2021. Cette chute a été considérée comme une aubaine pour les finances publiques tunisiennes, notamment en matière de charges de compensation des produits pétroliers importés, qui sont directement liés aux cours mondiaux du pétrole. En effet, chaque dollar en moins sur le prix du baril permettrait une économie estimée à 140 millions de dinars tunisiens. Aujourd’hui, en revanche, la Tunisie risque de grignoter dans ces économies réalisées pendant ces derniers mois d’autant plus que la montée des inquiétudes sur fond de la nouvelle escalade militaire impliquant l’Iran n’augure rien de positif pour le prix du pétrole. Rien ne garantit désormais que les prix de carburants, maintenus inchangés depuis déjà presque deux ans, ne reprennent pas leur envol, entraînant dans leur sillage une hausse généralisée des coûts de production et une flambée des prix de tous les produits de consommation.
Si le prix du baril venait à dépasser les 100 dollars dans les semaines à venir, les conséquences pour l’économie tunisienne seraient considérables. D’abord sur le plan budgétaire, cela obligerait l’État à revoir en urgence ses équilibres financiers, soit en augmentant la compensation, soit en procédant à des hausses de prix à la pompe, ce qui serait politiquement sensible dans un contexte social déjà tendu. Ensuite, l’effet domino sur le coût du transport, de l’électricité et des intrants industriels provoquerait un emballement inflationniste difficile à contenir. Cela mettrait sous pression le pouvoir d’achat des ménages, en particulier les plus vulnérables, et freinerait la relance de secteurs clés comme l’agriculture, le tourisme ou l’industrie manufacturière. Pour une économie fortement dépendante des importations énergétiques et déjà fragilisée par une dette extérieure élevée, le baril à plus de 100 dollars pourrait constituer un véritable choc exogène, à même de ralentir encore davantage la croissance et de compliquer les perspectives de redressement à moyen terme.

H.G.

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