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Editorial : Sombres perspectives… nucléaires…

Par Chokri Baccouche

Pour ceux qui l’ignorent, le monde comptait un nombre record de 70 374 ogives nucléaires dont plus de 40 000 étaient soviétiques et 23 000 américaines. Depuis, l’arsenal des armes de destruction massive n’a cessé de décroître, année après année, grâce aux accords de contrôle des armements signés par Moscou et Washington. Pour l’année 2024, le stock mondial s’élève à 12 121, selon la Fédération des scientifiques américains (FAS), une organisation de chercheurs indépendants faisant référence sur ce type d’évaluation.

Mais les apparences sont trompeuses. Cette diminution est essentiellement le résultat du démantèlement des ogives nucléaires américaines et russes retirées du service. Soit celles qui ne sont plus dans les stocks militaires, qui regroupent les ogives considérées comme opérationnelles (déployées dans des armes) et celles en réserves. Ces dernières années, seuls les Etats-Unis ont continué à diminuer leur stock militaire, et seuls la France et Israël ont conservé un nombre égal d’ogives, selon la FAS.

Mais cette embellie n’aura été finalement que de courte durée puisqu’on assiste aujourd’hui à une relance tous azimuts de la course nucléaire dans un contexte de rivalités exacerbées entre les grandes puissances, jamais connue auparavant depuis la fin de la guerre froide.

Selon les dernières statistiques, il y aurait actuellement plus de 17 mille ogives nucléaires dans le monde détenues par neuf pays qui font partie du club très sélect des puissances atomiques. Avec 5044 têtes nucléaires environ, la Russie occupe la première place du hit parade. Elle est talonnée par les Etats-Unis (5.044 ogives), la Chine (500), la France (290), le Royaume Uni (225), l’Inde (170) ex æquo avec le Pakistan (170), Israël (90) et enfin la Corée du Nord (50 ogives nucléaires environ).

Question : qu’est-ce qu’on peut faire avec un tel arsenal nucléaire ? Eh bien, on peut faire péter par exemple la planète toute entière plus d’une centaine de fois successives.

Pour faire plus simple, cela revient à détruire toute forme de vie sur la terre. C’est-à-dire qu’il n’y aura plus aucun être humain, sauf peut-être quelques rares privilégiés qui ont les moyens de se barricader dans des bunkers souterrains et sauver ainsi leur peau momentanément, plus aucun bonobo, ni éléphant, plus aucun hippopotame, ni kangourou… Bref, il n’y aura plus aucun œil pour pleurer ce qui adviendra du monde tel qu’on l’a depuis toujours connu.

Selon la cotation mondiale Campagne internationale pour l'abolition des armes nucléaires (Ican),  il suffirait de 1.000 têtes nucléaires, soit 5 % des réserves mondiales, pour rendre la planète inhabitable.

Les conséquences dans ce cas précis seraient incalculables et donnent froid dans le dos : 150 millions de tonnes de fumée seraient ainsi émises dans la stratosphère, ce qui entraînerait une réduction de 45 % des précipitations dans le monde et le refroidissement de 7 à 8 °C de la température moyenne au sol, soit davantage qu'à l'ère glaciaire.

Les particules radioactives causeraient une réduction grave et prolongée de la couche d'ozone, avec une augmentation du rayonnement ultraviolet et des cancers de la peau, ainsi qu'une destruction de la vie marine.

Adieu la vie, bonjour l’Armageddon ou l’apocalypse, au choix : tel est le destin funeste qui sera inévitablement réservé à l’ensemble des humains au cas où un « potentat nucléaire » viendrait à appuyer sur le bouton pour déclencher une guerre mondiale nucléarisée. Il faut dire que le monde retient son souffle avec la montée des tensions entre les grandes puissances qui font étalage, ces derniers temps et à qui mieux mieux, de leur puissance et leur capacité nucléaire.

Face à un tel danger qui menace la planète, est-il possible d’envisager un monde dénucléarisé ? Dans un discours prononcé à Prague, l’ancien président américain, Obama, a créé la surprise en évoquant cette éventualité que les experts considèrent comme l’unique alternative pour éviter le pire.  Mais, de la parole aux actes, il y a un fossé que les puissances nucléaires ne sont pas encore prêtes à franchir.

La raison en est que ces puissances craignent qu’une dénucléarisation progressive de la planète changerait les rapports de force. En un mot comme en cent, elles voudraient bien faire évoluer les choses mais sans que les équilibres actuels qui tournent à leur avantage ne soient remis pour autant en question. Le Conseil de sécurité des Nations unies donne à cet effet un exemple frappant dans la mesure où les cinq membres permanents de cet organe décisionnaire sont les cinq grandes puissances nucléaires.

De ce qui précède, on peut vraiment dire que la planète n’est pas près de sortir de sitôt de la galère atomique. La détention par une poignée de pays du monopole de la terreur a des visées non seulement dissuasives mais elle est envisagée également comme un moyen de domination à des fins géopolitiques et stratégiques. Dans un monde de plus en plus régi par la loi de la jungle et où le droit et la justice n’ont plus droit de cité, la course aux armements qui fait rage actuellement n’est, en définitive, qu’une conséquence logique de cet état de fait.

Tous les pays s’y lancent pour protéger leurs arrières et se prémunir contre les convoitises et les appétits voraces des prédateurs. De là à penser que les humains portent les germes de leur propre destruction, il n’y a qu’un pas que beaucoup ont déjà franchi depuis belle lurette.

L’humanité est-elle condamnée à vivre sous la menace permanente de l’épée nucléaire ? ça sera le cas apparemment et on peut même dire que le sort des terriens ne tient plus désormais qu’à un fil ténu : il suffit en effet qu’un politicien détraqué décide, pour une raison ou une autre, de déclencher les hostilités atomiques pour ouvrir durablement les portes de l’enfer…

C.B.

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