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Projet de loi portant sur l’interdiction de la sous-traitance : Quel impact aura la réforme sur le marché de l’emploi

Par Myriam BEN SALEM-MISSAOUI  

 1,6 million de salariés concernés…


La sous-traitance est dans le collimateur du législateur qui, par le biais d’un projet de loi, vise à lutter contre l’emploi précaire. Quelles sont les retombées de cette réforme aussi bien sur les conditions du travail que sur les équilibres financiers des entreprises?


Le texte en question faisant partie d’un projet de loi visant à amender le Code du travail, avec pour objectif encadrer davantage les contrats de travail et interdire la sous-traitance de la main-d’œuvre. Les nouvelles dispositions proposées par ce projet de loi stipulent que le contrat de travail est conclu pour une durée indéterminée. Une période d’essai, ne dépassant pas six mois et renouvelable une seule fois, pourra toutefois être incluse dans le contrat. Le même texte précise, selon l’agence TAP que les contrats de travail à durée déterminée ne seront autorisés que dans des cas exceptionnels, tels que l’exécution de travaux justifiés par une augmentation temporaire de l’activité, le remplacement d’un salarié absent ou la réalisation de travaux saisonniers. En outre, le projet de loi prévoit une conversion automatique des contrats à durée déterminée en contrats à durée indéterminée pour tous les cas ne relevant pas des exceptions mentionnées. Il permet également la conclusion de contrats de prestation de services ou d’exécution de travaux entre entreprises, mais sous des conditions strictes. A noter que 20% des ouvriers en sous-traitance opèrent dans le secteur public et le reste dans le secteur privé d’où  cette volonté de renforcer le rôle social de l’État, garantir la dignité du travailleur et promouvoir l’accès à un emploi stable et équitablement rémunéré, nous dira l’expert en économie et en finances, Mohamed Salah Jennadi. Quelles sont, de fait, les retombées de cette réforme aussi bien sur les conditions du travail que sur les équilibres financiers des entreprises ?

Travaillant beaucoup, gagnant peu …
Selon les données de l’Institut tunisien des études stratégiques (ITES), rattaché à la présidence de la République, 1,6 million de Tunisiens occupent des emplois précaires. Des chiffres qui ont des conséquences lourdes aussi bien sociales qu’économiques. A titre d’exemple, «cette précarité a coûté cher à la Caisse Nationale de Sécurité Sociale (CNSS), avec des pertes estimées à 1,4 milliard de dinars en 2020». Interrogé à ce sujet, l’expert en économie et en fiances, Mohamed Salah Jennadi, nous a confié : «Selon le recensement opéré par les experts en ressources humaines, la Tunisie compte 300 sociétés de sous-traitance – déclarées ou non – embauchant environ 230 000 ouvriers, dont 167 000 œuvrant dans les services de nettoyage et de gardiennage. Alors, une fois soumis au régime de la cotisation sociale et l’imposition fiscale, l’Etat fait là d’une pierre deux coups, à savoir assurer une protection sociale à plus de 230 mille travailleurs et renflouer ses caisses avec un peu plus de 1 milliard de dinars de recette fiscale. Côté entreprises, la facture sera lourde pour les équilibres financiers. On craint, alors, un ralentissement au niveau des recrutements, ce qui engendrera une hausse du taux du chômage». Selon, également, le ministère de l’Emploi et de la Formation professionnelle : «42% des employés âgés de 20 à 24 ans travaillent d’une manière informelle, sans couverture ni protection sociale. Une situation qui pose problème, à cause de son impact négatif sur les caisses, pilier de la sécurité sociale en Tunisie. L’informalité de l’emploi figure parmi les problématiques majeures auxquelles la population active jeune est désormais confrontée. Elle compte également parmi les principales causes de vulnérabilité de la protection sociale en Tunisie, l’un des rares systèmes de sécurité sociale dans la région Mena, quasi-complet à couvrir la majorité des catégories socioprofessionnelles, et ce, en se rapportant aux normes minimales de la sécurité sociale établies par l’Organisation internationale de travail». Mais pourquoi le travail informel pose-t-il autant de problèmes, au niveau de la sécurité sociale?
Il est convenu de définir le travail informel en tant qu’ensemble d’emplois, salariés ou non, qui ne bénéficient pas d’une couverture sociale et qui possèdent les mêmes caractéristiques de l’emploi occupé. Autrement dit, le travail informel englobe l’emploi dans le secteur informel et celui hors du secteur informel (c’est-à-dire dans le secteur formel et dans les ménages, travailleurs domestiques). En 2015, le taux du travail informel estimé s’élève à 32,2% de la population active occupée, soit 1.092.000 travailleurs informels, selon une étude réalisée par le Centre de recherches et d’études sociales en collaboration avec la Banque africaine de développement. Il est notoire que ce taux a connu une hausse continuelle après la révolution ; ainsi il est passé de 28% en 2010 à 32% en 2015. En dépit de sa valeur élevée, ce taux reste le plus faible parmi les taux enregistrés dans les pays du Nord de l’Afrique.

M.B.S.M.

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