Par Hassan Ghediri
Devant la multiplication des atteintes au domaine public maritime, l’Agence de Protection et d’Aménagement du Littoral (APAL) cherche à renforcer ses outils de surveillance…
Loin d’être des cas isolés, les violations aux règlements régissant les domaines d’Etat sont monnaie courante en Tunisie. Sur toute la longueur de nos côtes qui s’étendent sur près d e1300 kilomètres, les dépassements ont pris une proportion alarmante, encouragés par le sentiment d’impunité et le manque de fermeté dans l’application des lois. La diversification et la multiplication des atteintes aux côtes est telle que l’Agence de protection et de l’aménagement du littoral (APAL), le gendarme du domaine public maritime; s’est trouvée impuissante avec les moyens logistiques et humains mis à sa disposition. Il était alors devenu obligatoire et urgent de la doter des solutions lui permettant de remédier à ses défaillances. C’est dans cette optique que s’inscrit le projet de perfectionnement du dispositif de la surveillance à travers la mise en place d’une solution technologique qui permet de simplifier la détection des infractions, la transmission des données et la prise de décision.
L’APAL vient en effet de lancer une consultation pour la fourniture et l’installation d’une solution de transmission sécurisée des données de son réseau de surveillance déployés sur le littoral du pays. L’agence cherche à être plus vigilante et surveille en temps réel le domaine public maritime pour mieux contrecarrer les dépassements.
La solution recherchée doit garantir la sécurisation de la collecte des données par des capteurs installés sur les plages et lors de leur transmission instantanée par l’intermédiaire des puces électroniques de télécommunication vers les serveurs de l’APAL. Les données mieux structurées et sécurisées sont directement intégrées au système informatique de l’agence permettent leur déchiffrage et leur exploitation efficace et une conversion rapide et fiable, ce qui facilitera la prise de décision en matière de prévention des dépassements et de l’aménagement.
Inefficacité
Depuis plusieurs années, le domaine public maritime tunisien fait l’objet de dépassements systématiques. Dans la région d’Hammamet, réputée par ses plages attractives, des établissements touristiques ont empiété sur le littoral, érigeant des structures fixes sur des plages censées rester libres d’accès. À Mahdia, des remblais sauvages ont été opérés pour étendre artificiellement des propriétés privées sur le domaine maritime, bouleversant les écosystèmes côtiers fragiles. À Sfax et Gabes, la pollution industrielle a rendu plusieurs plages infréquentables, tandis que dans le Grand Tunis et à Bizerte, les règles délimitant l’occupation du domaine public maritime sont bafouées sous le nez et la barbe de tout le monde. Des exemples qui illustrent l’ampleur des pressions sur le littoral qui prolifèrent sur fond de la spéculation foncière, l’urbanisation incontrôlée et le laxisme des autorités dans l’application des lois.
L’inefficacité des outils de surveillance et de la logistique de prévention empêche depuis longtemps l’APAL de remplir convenablement sa mission. Les solutions technologiques constituent ainsi une meilleure réponse aux multiples exigences auxquelles s’expose l’agence en ce qui concerne la rapidité de la constatation des infractions et la proclamation des sanctions appropriées.
Dans le monde, la numérisation de la surveillance du littoral a aidé plusieurs pays à mieux surveiller l’évolution de l’érosion côtière et à anticiper les risques liés au changement climatique et à mieux protéger les zones sensibles. Pour l’APAL, le défi est double. D’un côté, il s’agit de préserver un littoral constituant une ressource économique de premier ordre, notamment pour le tourisme, la pêche et l’équilibre des écosystèmes naturels, et de l’autre côté de réaffirmer la souveraineté du domaine public maritime de plus en plus mise en cause par les intérêts privés. En investissant dans des solutions technologiques, l’agence se dote d’un instrument qui lui permet de mieux s’acquitter de sa mission de protection mais cette tâche demeure insuffisante sans l’investissement dans les ressources humaines et la sensibilisation des citoyens pour la création d’une conscience collective valorisant le respect du domaine public maritime.
H.G.