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Inscrit sur la liste du patrimoine immatériel de l’UNESCO : Dans le noir du Khôl, la Tunisie écrit son histoire

 

Par Imen Abderrahmani 

 

Voilà une bonne nouvelle. « Le khôl » vient d’être inscrit sur la liste du patrimoine immatériel de l’humanité de l’UNESCO, affirmant la place de choix qu’occupe ce produit de beauté, qui a traversé le temps, dans les sociétés arabes aujourd’hui.

 

C’est la saison des inscriptions et de belles annonces pour de nombreuses institutions du patrimoine qui ont déposé des dossiers pour inscrire certaines pratiques ancestrales sur la liste du patrimoine mondial de l’humanité de l’UNESCO.

Parallèlement au dossier de Sidi Bou Saïd, et d’autres dossiers en cours comme celui de la Jebba traditionnelle tunisienne et de l’habit traditionnel de Mahdia, la Tunisie, dans le cadre d’une candidature arabe conjointe, a réussi à inscrire « Le Khôl », lors de la 20ème session de l’Unesco. Une inscription qui certes donnera un coup de pouce à ces artisanes qui détiennent ce savoir-faire ancestral qui continue à embellir les yeux des Tunisiennes.

Soumise le 2 avril 2024, cette candidature arabe conjointe réunit neuf pays : la Syrie, l’Irak, la Jordanie, la Libye, Oman, la Palestine, l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et la Tunisie.

Cette reconnaissance mondiale salue un savoir-faire qui allie artisanat, esthétique, médecine traditionnelle et identité culturelle.

Fabriqué à partir d’ingrédients naturels, transmis principalement par les femmes au sein des familles, le khôl constitue un symbole d’expression, notamment féminine, un lien intergénérationnel et un élément central des routines quotidiennes comme des grands événements de la vie.

Sa diffusion dans l’ensemble du monde arabe en fait un pont culturel entre communautés, régions et nations, renforçant le dialogue et le partage de pratiques millénaires, lit-on sur le site de l’Unesco.

« Présent dans la vie quotidienne, les occasions spéciales et les rituels religieux, il est fabriqué à partir d’ingrédients naturels, la préparation variant en fonction des environnements locaux et des modes de vie. Le khôl est fabriqué à la maison ou lors de rassemblements, principalement par des femmes qui transmettent les connaissances et les savoir-faire associés à leurs filles et petites-filles », lit-on encore sur le site de l’UNESCO qui rappelle également qu’ « outre le fait qu’il est un symbole de l’identité des communautés et un élément clé des routines de beauté quotidiennes, le khôl est utilisé comme remède de guérison physique et spirituelle…Les yeux maquillés à l’aide du khôl constituent également une forme forte d’expression féminine, en particulier dans les sociétés où seuls les yeux sont visibles en raison de la dissimulation du visage ».

L’ancien art du Khôl en Tunisie

La réalisation du dossier tunisien a été assuré par le Centre des arts, de la culture et des lettres (CACL – Ksar Saïd) et ce suite à un inventaire national qui a permis de localiser géographiquement cette pratique et de suivre de près les différentes étapes permettant d’obtenir cette poudre fine qui ne sert pas seulement pour embellir les yeux mais également pour les protéger des sables et du vent.

En Tunisie, l’usage du khôl est très répandu dans la vie quotidienne comme dans les cérémonies de mariage ou de naissance. Outre son apport esthétique, on lui attribue plusieurs vertus thérapeutiques Il présent dans toutes les régions et transmis entre générations. Selon toujours les informations collectées pour l’inventaire, la fabrication traditionnelle est en régression. Il ne reste que quelques artisanes dans les zones rurales qui continuent à fabriquer du Khôl. Le sud du pays demeure toutefois le principal bastion de cette pratique, notamment pour ses rituels masculins spécifiques (se protéger des maladies oculaires et des tempêtes de sable).

Sa préparation, bien qu’elle semble être facile, elle nécessite un savoir-faire permettant de réussir les différentes étapes dont la première et la plus basique à la purification et le broyage de la pierre d’antimoine. A laquelle sont ajoutées des noyaux de dattes grillés. Ils sont ensuite broyés jusqu’à l’obtention d’une poudre fine, tamisée et conservée dans des récipients traditionnels en verre, en cuivre et même en bois du palmier, dits « Mak’hala ». L’application se fait à l’aide du « mirwed », petit bâtonnet en cuivre ou en bois.

En véritable résistant, le khôl a réussi à affronter l’épreuve du temps et a survécu aux bouleversements économiques, aux changements socioculturels, à l’évolution des normes de beauté et surtout à l’explosion des produits de beauté industriels. Voilà des siècles plus tard, le Khôl est encore vedette. Il a même fait son entrée dans l’industrie des cosmétiques. Le crayon du Khôl dans sa forme moderne est l’indispensable de millions de passionnés de maquillage.

Alors qu’attendez-vous pour sortir vos crayons, qu’ils soient noir dans la pure tradition ou ayant d’autres couleurs, pour dessiner vos yeux ? Ou encore pour le demander de certains vendeurs dans les souks traditionnels ou de vos grands-mères, certes, elles connaissent le secret ? Du « Khôl arbi » ou du Khôl industriel ? A vous de choisir !

Imen.A.  

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