contactez-nous au 71 331 000
Abonnement

Editorial : Numériser les services publics ? Oui. « Digitaliser la bureaucratie » ? Non !

Par Hassan GHEDIRI

L’exercice parlementaire le plus attendu de l’année entame demain sa dernière ligne droite. Démarré mi-octobre avec le dépôt du projet à l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), le marathon parlementaire pour doter le pays d’un nouveau budget de l’Etat arrive à la phase cruciale, lors de laquelle les députés débattront en plénière le texte dans son intégralité après avoir été examiné pendant plus de deux semaines au sein des commissions.

Dans le planning de semaine, le Bureau de l’Assemblée a, en effet, programmé pour demain et après-demain 5 et 6 novembre 2025 la plénière pour le débat du budget de l’Etat de 2026. A l’ordre du jour :  l’examen du PLF2026, le projet du budget de l’Etat ainsi que le bilan économique. Comme le veut le rituel, la cheffe du gouvernement exposera les grandes orientations de ce projet dans une allocution donnée à la même occasion.

Le parlement, qui va sans aucun doute réussir à adopter le budget dans les délais, verra plusieurs chapitres obtenir facilement l’unanimité. Ce sont ceux qui tentent de répondre à des problématique   d’intérêt général et qui suscitent un très grand intérêt pour la société tout entière.

Dans le PLF2026, le gouvernement a prévu un ensemble de mesures censées aider à booster la transformation digitale de l'administration et œuvrer à accélérer l'interconnectivité en tant qu'instrument de modernisation de l'administration, de transparence et de facilitation des transactions.

Des dispositions qui visent à ouvrir des perspectives permettant de stimuler l'économie digitale. Affichée comme une priorité mais qui sonne comme une promesse récurrente, la transformation digitale de l’administration n’est guère une tâche aisée face à une bureaucratie tunisienne demeurant, depuis très longtemps, un obstacle insurmontable entravant toute forme de modernité.

Le PLF2026 prévoit une série de mesures ambitieuses qui visent à généraliser les services en ligne, l’unification des plateformes de données publiques par l’interconnexion et l’interopérabilité des administrations et la dématérialisation de prestations publiques ainsi que le renforcement de la cybersécurité.

De quoi faire rêver d’une transformation radicale du quotidien des Tunisiens, sauf que voilà, dans notre pays, l’expérience a montré qu’entre la déclaration des bonnes intentions et l’exécution l’Etat a souvent tendance à « se noyer » dans les méandres de la bureaucratie.

Depuis plus d’une décennie, chaque gouvernement promet la digitalisation sans pouvoir parvenir à provoquer la transformation qui libère les citoyens des délais interminables, des paperasses absurdes et des procédures héritées d’un autre siècle.

Les quelques tentatives de modernisation s’avèrent souvent sans lendemain et la technologie se transforme en un instrument de « numérisation de la lenteur ». Beaucoup de plateformes électroniques ont été annoncées sans que cela permettre de simplifier les démarches et lorsque le citoyen ne fait plus la queue devant un guichet il doit attendre derrière un écran.

Il n’est pas d’ailleurs étonnant que la Tunisie figure parmi les pays où la relation entre le citoyen et l’administration est très tendue. La bureaucratie devenue au fil des ans, un mode de gouvernance a fini par engendrer une méfiance généralisée chez les citoyens qui ne croient plus en l’administration. Dans son nouveau PLF, l’exécutif tente donc de combattre cette méfiance en éliminant les sources de tension.

Cela ne peut toutefois aboutir qu’avec un véritable changement des mentalités au sein de l’administration, c’est-à-dire les mentalités des fonctionnaires. On aurait tort de croire que la digitalisation suffit à transformer l’État, parce que la technologie, seule, n’est qu’un outil et la réforme est une cause perdue.

Sans refonte des procédures, sans simplification des circuits décisionnels, sans responsabilisation des cadres, les applications les plus sophistiquées, les serveurs les plus puissants et les logiciels les plus coûteux ne serviront à rien. Dans le monde, on évoque déjà de l’invasion de la bureaucratie digitale.

Pire que l’ancienne !

H.G.

Partage
  • 25 Avenue Jean Jaurès 1000 Tunis R.P - TUNIS
  • 71 331 000
  • 71 340 600 / 71 252 869