Par Hassan GHEDIRI
Le gouvernement Zerzri va siffler la fin de la récréation pour les fonctionnaires et agents publics sans scrupule habitués à se la couler douce sur le dos des contribuables. Ce sera, selon toute vraisemblance, la grande guerre contre l’irrespect du temps du travail qui fait perdre, chaque année, à l’Etat des sommes colossales. Car incontestablement, l’indiscipline des fonctionnaires et agents publics concernant le respect du temps du travail est un sport national.
Le phénomène a la peau dure, et il est grand temps pour dire stop à une débandade qui, sans trop exagérer, est vieille comme l’administration. Quantitativement, il est toujours compliqué d’estimer l’ampleur du fléau, mais il y a une chose sûre, c’est que la tension caractérisant les relations des citoyens avec le service public en Tunisie est la conséquence des manquements des agents publics aux règles de la ponctualité et de l’assiduité.
L’antidote prescrit par le gouvernement et que les ministères devaient administrer sans tarder dans l’ensemble des administrations et établissements publics consiste en la mise en place d’un dispositif de contrôle de la présence et de l’assiduité des fonctionnaires et agents publics.
Dans une note signée par la cheffe du gouvernement, Sarra Zaâfrani Zerzri, et adressée le 23 octobre dernier à tous les ministères, des consignes ont été, ainsi, données pour l’acquisition et le déploiement des systèmes de pointage par empreinte digitale.
L’on peut lire dans cette même note qu’une fois ce système de pointage généralisé et fonctionnel, le gouvernement aura accès à des comptes rendus mensuels comptabilisant toutes les absences et les retards des agents publics ainsi que les éventuelles mesures administratives et disciplinaires prises à leur encontre par leurs hiérarchies respectives.
Il deviendra donc possible, grâce à ce système de pointage, d’évaluer le coût des retards parce qu’il n’était pas possible jusque-là de mesurer les retombées de l’indiscipline dont font preuve des milliers de fonctionnaires et agents publics en Tunisie.
En 2016 une enquête menée par la direction de contrôle général des services publics touchant environ 5500 agents et fonctionnaires publics avait, toutefois, révélé un taux d’absentéisme s’élevant à 14% contre un taux de retard pouvant atteindre 40% dans certaines administrations publiques. Les retards sont dans la plupart des cas justifiés par des difficultés de déplacement et les embouteillages.
Quelles que soient les causes, ces retards impliquent des pertes irrémédiables sous forme de millions de jours de travail dilapidés mais qui pèsent lourdement dans les charges salariales supportées par l’Etat mais qui est, en fin de compte, financé par l’argent du contribuable, c’est-à-dire le citoyen qui subit, seul, la frustration du service public.
Un contrôle plus efficace de la ponctualité et de l’assiduité du travail dans le secteur public constitue un mécanisme essentiel pour assurer le bon fonctionnement et la fluidité des administrations, garantir l’efficacité dans l’accomplissement des missions, renforcer la gouvernance et la responsabilité, mais aussi instaurer une culture de discipline et de service dans les établissements publics.
La réussite de cette opération dépendra, avant tout, de la volonté réelle de l’État d’aller jusqu’au bout de sa logique. Car les précédentes tentatives de redressement administratif se sont souvent essoufflées face à la résistance d’un système bureaucratique solidement enraciné, où la complaisance et les passe-droits ont longtemps servi de ciment à la machine publique.
La mise en place des dispositifs de pointage, aussi modernes soient-ils, ne suffira pas si elle n’est pas accompagnée d’un changement profond des mentalités et d’une réhabilitation du sens du devoir.
L’efficacité du service public ne se résume pas à une question d’empreintes digitales, mais bien à une prise de conscience collective. Parce que chaque minute perdue dans un bureau, chaque retard non sanctionné, coûte au pays des millions de dinars et mine la confiance des citoyens envers l’administration.
H.G.

