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Editorial : Assez de tergiversations et vite agir… - Par Hassan GHEDIRI

24 longs mois, quatre gouvernements, des nominations et des limogeages se succédant à la tête des ministères et des établissements en charge du domaine scolaire et universitaire et voilà que les acteurs du milieu éducatif en Tunisie attendent désespérément que sonne enfin l’heure de la réforme. Annoncée pour la première fois au mois d’avril 2023, cette réforme supposée être des plus urgentes ne bouge pas. Certes, s’agissant d’un chantier colossal impliquant pas moins de cinq ministres avec leurs vastes réseaux d’établissements et gigantesques ressources humaines, le processus devient long, lent et très compliqué. Le hic, c’est que face à la gravité des défaillances et à la multitude des exigences, ceux auxquels est confiée la fastidieuse tâche de la mise sur rail de cette réforme semblent complètement déboussolés, ne sachant plus par où commencer. Entre temps, c’est environ trois millions d’élèves et étudiants - soit le quart de la population - qui se voient forcés de poursuivre un cursus d’apprentissage entaché de carences et de lacunes fondamentales. Le vœu de Kaïs Saïd de rendre ses lettres de noblesse à ce qui fut pendant des décennies la condition unique et exclusive de la réussite sociale est, à force d’être réitéré, devenu une véritable promesse. Une promesse (non déclarée) qui consiste à bâtir une nouvelle Ecole (avec un grand E) capable de fabriquer des compétences adaptées aux exigences de l’économie nationale et mondiale, et forger de bons citoyens, hommes et femmes. Une merveilleuse œuvre qui demeure néanmoins invisible voire utopique. 

Il y a bientôt deux ans qu’a été lancée la fameuse consultation nationale électronique sur la réforme du système éducatif. Ce sondage d’opinion de grande envergure mené par claviers interposés à l’échelle du pays a fait office d’un «grand débat national» sur l’avenir de l’école. L’opération a, souvenons-nous, mobilisé quelque 560 mille Tunisiens et, logiquement, autant de contributions nécessitant un dépouillement et une synthèse méticuleux. Il reste quand même complètement absurde qu’après tous ces mois passés, l’on omet de divulguer le moindre petit détail sur les orientations et les choix ayant éventuellement été pris pour l’avenir de l’éducation dans le pays. Si, d’emblée, le mot d’ordre était «prudence», la réalité impose l’urgence. Car, à voir comment le monde de l’éducation évolue aujourd’hui avec ces transformations radicales des outils et des domaines d’apprentissage, peut-on encore croire en la possibilité de réformer l’école en restant accablé par l’hésitation ? Réformer, c’est savoir s’adapter tout de suite pour ne pas rester à la marge d’une révolution mondiale qui est en passe de modeler fondamentalement l’école pour des décennies à venir. Il faut sortir de l’hésitation et prendre vite des décisions. Ce qui manque aujourd’hui, ce n’est ni l’expertise, ni les moyens, bien qu’insuffisants, mais bien une forte volonté d’engager un processus véritablement transformateur. Les acteurs éducatifs, qu’ils soient enseignants, étudiants, syndicats et parents attendent une orientation et des choix clairs et cohérents. 

Or, le projet semble encore confiné dans les tiroirs des ministères, pris dans les engrenages de la bureaucratie. Pendant ce temps, les inégalités territoriales s’accentuent, le décrochage scolaire prend des proportions alarmantes et l’université continue de former des diplômés en inadéquation avec les besoins réels du marché. Peut-on se permettre encore une année blanche de plus en matière de réforme, quand chaque rentrée scolaire ou universitaire ajoute une couche supplémentaire à une crise déjà chronique?

À l’heure où les nations les plus avancées font de l’intelligence, de la créativité et de l’innovation leurs principaux moteurs de développement, nous ne pouvons continuer à naviguer à vue. La réforme de l’école ne peut plus consister en un simple slogan mais en une urgence nationale.

H.G.

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