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Editorial : Madame Claude et le deal de la honte…

La nouvelle a de quoi faire pousser un cactus californien sur la tête d’un chauve, tellement elle est absurde et terriblement piquante. Qu’on en juge : selon les médias américains, l’administration Trump a entamé des discussions avec certains pays tiers comme la Libye, le Rwanda et le Salvador pour examiner la possibilité d’envoyer des immigrants ayant un casier judiciaire et se trouvant aux Etats-Unis vers ces pays. Dans le cadre de ce même projet en gestation qui ne prédit rien de bon, l’ancienne Jamahiriya fait l’objet d’un traitement de faveur. En plus de renvoyer vers ce pays les migrants ayant un casier judiciaire aussi vierge que les filles de joie de Madame Claude, les responsables US espèrent également entamer des négociations formelles avec leurs homologues libyens pour conclure un soi-disant «accord de pays tiers sûr» qui permettrait aux Américains de renvoyer en Libye les demandeurs d’asile appréhendés à la frontière américaine. Y a pas à dire, les gars d’outre Atlantique ont de la suite dans les idées. Des idées saugrenues s’entend. Pour se débarrasser une bonne fois pour toutes des migrants clandestins qui affluent par milliers aux Etats-Unis, ils envisagent de les transférer tout simplement vers d’autres pays vulnérables qui ont la particularité de tirer déjà le diable par la queue. De gré si possible, par les pressions et l’intimidation si nécessaire. Les médias américains ne le disent pas bien sûr, mais on peut le deviner facilement car aucun gouvernement sensé ne peut, logiquement, accepter de gaieté de cœur un cadeau aussi empoisonné.

Plus vicieux et sournois que ce projet, il n’y en a pas. La Libye, pour ne citer que ce pays, nage déjà dans un marécage de problèmes. Livré au chaos et à l’anarchie suite à l’intervention armée des pays de l’OTAN qui a précipité la chute du régime de Mouammar Kadafi, notre voisin du Sud peine à sortir depuis de l’ornière. Les rivalités interlibyennes et les convoitises des puissances étrangères se sont posées en obstacles pour un retour de la paix et de la stabilité dans ce pays exsangue, ravagé par la guerre et devenu par la force des choses un terrain de confrontation d’intérêts diamétralement opposés. Et comme si la Libye n’avait pas assez de problèmes, sécuritaires et autres liés à l’émigration irrégulière des Subsahariens, voilà que les Américains envisagent d’enfoncer encore plus le clou. Ils se proposent en effet de transférer vers ce pays non seulement tous les migrants indésirables qui affluent à leurs frontières mais également la crème de la crème des détenus qui croupissent dans leurs prisons. Dans le tas, on trouve surement des narcotrafiquants, des assassins, des truands et des violeurs. Bref des zigs infréquentables portés sur la violence et la gâchette qui viendront mettre, inévitablement, un peu plus d’ambiance dans le pays aux côtés des fanatiques barbus déjà présents sur le terrain.

Qu’est-ce qu’on dit ? Merci ! Merci qui ? Merci M. Trump pour cette lumineuse et tendre pensée pour nos frères libyens. Après Gaza, vouée à devenir bientôt la « Riviera du Moyen-Orient », place donc à un projet pas du tout « Tripoli » sur les bords mais tout aussi « constructif ». Les Etats-Unis qui ont envoyé leur soldatesque par OTAN interposée pour zigouiller l’ancien Guide libyen, se proposent de parachever leur œuvre magistrale en transformant le pays qu’ils avaient livré à l’anarchie en un immense camp de rétention de desperados et autres repris de justice de la pire espèce. Le « rêve américain » s’africanise ou plutôt se libyanise au grand bonheur des pays voisins de la région qui risquent inévitablement de subir les effets pervers de ce projet atypique. Peste et choléra : les pays occidentaux ne vont pas, décidément, par quatre chemins pour régler leurs propres problèmes. Ils les déversent tout simplement sur les autres. Hello ! How are you ? Occupez-vous en les gars, sans faire trop de chichi et qu’on n’entende plus parler. L’ordre est direct, parfois sec, parfois prononcé avec un petit sourire diplomatique mais hypocrite, histoire de mettre un peu à l’aise les interlocuteurs pour mieux leur faire avaler la pilule amère.

Selon CNN, l’administration Trump a discuté de ce projet avec l’un des fils du maréchal Haftar, l’homme fort de la cyrénaïque. S’agit-il d’un deal fondé sur le « donnant-donnant » dans le sens que les Américains seraient prêts à accorder une contrepartie dont on peut imaginer d’ailleurs la teneur pour inciter le puissant maréchal à accepter leurs propositions ? L’hypothèse est fort plausible.

Ce qui est sûr en tout cas, c’est que ce projet qui tient apparemment à cœur les responsables américains est un véritable marché de dupes aux retombées potentiellement très dangereuses pour la stabilité précaire de la Libye. Aussi bien le camp de Khalifa Haftar que celui de son rival Abdelhamid Debaiba n’ont intérêt d’ailleurs à accepter ce deal, véritable attrape-nigauds, qui risque non seulement de plonger davantage la Libye dans les affres de l’incertitude mais également l’ensemble de la région…

C.B.

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