Par Myriam BEN SALEM-MISSAOUI
Les manifestations nocturnes ont repris à Gabès, et ce, suite à des cas d’asphyxie survenus vendredi dernier. Que faire pour rassurer une population locale au désarroi…?
Alors que les députés ont dénoncé, lors de la plénière consacrée au budget 2026 du ministère de l’Industrie, l’inaction de l’Etat face au phosphogypse rejeté en mer et aux dégâts sanitaires, Gabès vit depuis samedi dernier au rythme de manifestations nocturnes pour réclamer la fermeture du complexe d’industrie chimique, responsable selon les activistes d’une crise environnementale et sanitaire sans précédent.
Selon Business news : « Dans les différents quartiers, des groupes de manifestants ont érigé des barricades, bloqué les axes routiers et allumé des feux pour exprimer leur exaspération face à ce qu’ils qualifient de mutisme persistant des autorités. Au cœur des revendications : l’arrêt des activités industrielles du Groupe chimique (CGT) et ses émanations toxiques qui alimentent, depuis longtemps, les craintes pour la santé et l’environnement.
Invité de la matinale de Jawhara FM, Ahmad Chelbi, président de la section locale de la Ligue tunisienne des droits de l’homme (LTDH), a dressé à son tour, hier, un tableau préoccupant des dernières nuits d’affrontements. Selon lui, les forces de l’ordre ont largement recouru aux gaz lacrymogènes pour disperser les protestataires, provoquant de nombreux cas de suffocation.
Pour rappel, la région a enregistré vendredi dernier plusieurs cas d’asphyxie dont les victimes sont des élèves de l’école primaire de la rue El Ouaha. Selon les premières constatations, ces cas d’asphyxie ont été provoqués par les gaz toxiques provenant du Groupe chimique.
Depuis le début du mois d’octobre dernier, la région de Gabès est, en effet, le théâtre de manifestations et d’une grande mobilisation populaire pour exiger la fermeture des usines du Groupe chimique, une entreprise publique installée au nord de la ville de Gabès depuis les années 1970. Pourquoi, justement, le gouvernement tarde à proposer un plan d’intervention rapide et efficace afin d’apaiser les tensions et rassurer la population locale ?
Un plan graduel…
Il était, alors, évident que cette crise environnementale sera au cœur des débats dans le Parlement lors des plénières consacrées au Budget de l’Etat pour l’exercice de 2026. Justement, la situation à Gabès a éclipsé jeudi dernier toutes les autres questions lors de la plénière consacrée au budget 2026 du ministère de l’Industrie.
Les députés ont, en effet, dénoncé l’inaction de l’État face au phosphogypse rejeté en mer et aux dégâts sanitaires, tandis que la ministre, Fatma Thabet Chiboub, a tenté de rassurer sur les priorités du gouvernement.
La ministre a indiqué que le président de la République, Kais Saied, suit personnellement ce dossier appelant à trouver des solutions immédiates à cette crise. la ministre de l’Industrie a, par ailleurs, assuré « l’existence de programmes urgents, mais aussi de plans à moyen et long terme visant à améliorer la production et renforcer le respect des normes environnementales ».
Dans l’immédiat, des activistes se basant sur des rapports et des expertises élaborés par des spécialistes dont le juriste et universitaire Salem Chérif appellent à « remplacer les six unités existantes par une nouvelle zone industrielle conforme aux standards internationaux ».
ET d’ajouter : « Certains experts, dont le militant écologiste Ameur Jerid, appellent également à déplacer le groupe chimique loin du littoral pour réduire la contamination marine et installer des systèmes de filtration performants capables de réduire les émissions gazeuses à zéro, notamment celles de phosphogypse, un sous-produit dangereux qui ne devrait plus être rejeté dans la mer, mais enfoui dans des zones éloignées des nappes phréatiques et des zones habitées.
Certes, la réhabilitation environnementale de Gabès nécessitera de longues années de travail planifié, mais avec des projets structurants pilotés par l’État, on peut garantir la protection de l’environnement et du droit des citoyens à un cadre de vie sain ».
M.B.S.M.

