Par Imen Abderrahmani
Avec au programme des ateliers spécialisés en cinéma et des projections de films documentaires, la 4ᵉ édition du CinéLab s’ouvre aujourd’hui à Douz, offrant aux jeunes l’opportunité de pénétrer l’univers magique du 7ᵉ art.
Ce rendez-vous, qui se poursuivra jusqu’au 3 juin, insufflant une belle dynamique artistique à cette ville du sud tunisien, se veut une initiative visant à démocratiser la culture et à faciliter l’accès de la population au cinéma. À Douz, comme d’ailleurs dans de nombreuses villes tunisiennes du nord au sud, l’accès au cinéma demeure limité en raison de l’absence non seulement de salles de projection, mais aussi d’une culture de l’image et d’initiatives en la matière. C’est précisément là qu’intervient le CinéLab, un programme ciblant les jeunes et proposant une série de formations dans les différentes spécialités de la création cinématographique.
Le CinéLab est ainsi « un espace ouvert à l’expérimentation et à la création, une opportunité pour les jeunes d’exprimer leurs préoccupations à travers l’image, de développer leurs compétences artistiques dans un cadre collaboratif qui encourage le travail d’équipe et la pensée critique », explique le cinéaste Abdallah Chamekh, initiateur de ce programme et de ce forum défendant l’égalité des chances dans l’accès à la culture.
Débat d’idées et d’images
Pour cette journée d’ouverture, le programme propose la projection du film Sur les traces de lettres de Mohamed Salah Argui. Long-métrage documentaire tourné à Douz, ce film célèbre la poésie populaire, composante essentielle du patrimoine immatériel et de la mémoire collective des habitants de Douz, où tout le monde est poète et où la vie semble être un recueil de poèmes aux sensibilités variées. Document historique et ethnographique, le film met en lumière la pratique de la poésie et la place qu’occupe le poète dans sa société.
Portail du Sahara et l’un des fiefs les plus importants de la poésie populaire, Douz y est représentée à travers une série de portraits croisés de poètes considérés comme de véritables écoles, dont la renommée a dépassé les frontières de Kébili. Parmi les poètes dont le réalisateur a exploré l’héritage, on cite Salem Ben Omrane, Ali Lassoued Merzougui et Al-Aïdi Belghith, avec comme fil conducteur le poète Ayoub Ali Lassoued Merzougui, qui raconte sa vie par et pour la poésie.
La projection de ce film sera suivie d’un débat autour du thème : « Le patrimoine oral dans le cinéma documentaire ». Une belle opportunité pour souligner le rôle majeur du cinéma documentaire dans la préservation et la transmission du patrimoine.
Parmi les autres films à l’affiche de cette 4ᵉ édition, citons La couleur du phosphate de Ridha Tlili. Réalisé en 2024, d’une durée de 90 minutes, et projeté dans la Compétition nationale des JCC 2024, ce film raconte l’histoire d’Aïd, employé à la mine de phosphate de Redeyef, en Tunisie, et chauffeur d’un gros engin transportant la matière extraite. Il tente de fuir la marginalisation en s’adonnant au théâtre. Ce film se veut une lueur d’espoir, une lumière éclairant les esprits et le quotidien dans une ville engloutie par la poussière. Il est à noter que ce film a remporté le prix du meilleur long-métrage documentaire aux JCC 2024, toujours dans le cadre de la Compétition nationale.
« Les droits économiques, sociaux et culturels à travers le film documentaire » est le thème du débat prévu après la projection de La couleur du phosphate. Le débat se poursuivra le 1er juin, avec la projection du film « Matula » d’Abdallah Yahia.
Ce long-métrage documentaire, tourné à Hay Hlel, s’inscrit dans une démarche cinématographique centrée sur les quartiers populaires et marginalisés en Tunisie. Il relate le combat d’un jeune Tunisien issu de l’un des quartiers les plus défavorisés du pays pour échapper à la marginalisation et à la délinquance. Le rêve de Rayan, alias Matula, est de retrouver ses parents, son frère et sa sœur, qui ont quitté clandestinement le pays pour s’installer en Italie.
Relève
Outre ces projections, le programme de cette 4ᵉ édition du CinéLab comporte une série d’ateliers permettant aux jeunes participants d’acquérir des connaissances de base pour réaliser leurs premiers films. Ces ateliers sont animés par des professionnels : photographie avec Sami Kacem, techniques du film d’animation avec Chaker Kalai, écriture et réalisation avec Ridha Tlili et Abdallah Yahia. Ces formations ouvrent certainement les portes du rêve à ces jeunes dont l’accès à l’enseignement artistique reste limité.
Un ciné-concert en hommage à Yasser Jeradi, artiste engagé et fervent défenseur de l’égalité culturelle et des droits de tous les Tunisiens à la culture, est prévu le 3 juin. Pour la clôture, le programme prévoit la projection des projets réalisés dans le cadre des ateliers, ainsi que des rencontres-débats autour des thèmes : « Les droits culturels et le rôle du cinéma dans la construction de la conscience collective » et « L’importance du cinéma comme outil d’autonomisation culturelle ».
I.A.