Par Myriam BEN SALEM-MISSAOUI
L'usage du cash explose en Tunisie et son impact sur l'économie interpelle les experts. Comment expliquer ce phénomène et quelles en sont ses retombées ?
De 22,104 milliards en 2025, l'usage du cash est passé à 66,145 milliards de dinars et ce selon les chiffres publiés lundi 8 décembre 2025 par la Banque centrale de Tunisie. Un phénomène qui interpelle les experts, notamment au niveau de son impact sur l'économie nationale. "C'est l'effet direct de la nouvelle loi relative aux chèques. En témoignent les chiffres avancés par le dernier bulletin publié par la Banque centrale de Tunisie.
Le nombre de chèques télécompensés a, en effet, chuté de 67,9 %, pour s’établir à 5,9 millions. Le chèque n’a ainsi représenté que 3,7 % des moyens de paiement télécompensés en nombre, contre 37% pour la même période en 2024", nous apprend l'expert Mohamed Salah Jennadi.
Pour rappel, le montant total des chèques émis a baissé de 57,9 %, atteignant 40,21 milliards de dinars fin septembre 2025, contre 95,62 milliards de dinars fin septembre 2024. En valeur, le chèque n’a représenté que 25 % des paiements télécompensés, contre 53 % fin septembre 2024.
Pour notre expert, " il est alors logique de voir l'usage de l'argent en liquide exploser et ce en l'absence d'autres moyens de paiement fiables et qui peuvent remplacer le chèque". Et d'ajouter : "D'autres raisons expliquent la prolifération de l'usage du cash comme le marché noir et la contrebande.
Il faut savoir que le marché parallèle représente plus que 50% du total du marché… Alors, on évalue à plus de 10 milliards de dinars le montant du cash qui circule dans le marché noir ".
De son côté, l'activiste Rached Mathlouthi nous a indiqué : " Le climat social et politique qui a régné au lendemain de la révolution a donné lieu à un manque de confiance général et un sentiment de repli sur soi. Du coup, même le Tunisien lambda préfère vendre et acheter en cash". Qu'elles sont alors les conséquences de ce fléau sur l'économie nationale et que faire pour stopper cette hémorragie ?
Transparence ...
Une récente étude publiée par ledit spécialisé a montré que " dans le paysage financier actuel en constante évolution, le mode de transaction joue un rôle essentiel dans la détermination de l'efficacité, de la sécurité et de la transparence des opérations financières. Si les paiements en espèces constituent la pierre angulaire du commerce depuis des siècles, leur utilisation continue à l'ère moderne présente plusieurs défis.
Se basant également sur les résultats de la même étude, l'expert Mohamed Salah Jennadi estime que : " La monnaie physique, de par sa nature même, est vulnérable au vol et à la perte. Le fait de transporter de grosses sommes d’argent liquide augmente le risque d’être la cible d’un vol ou d’un cambriolage.
Contrairement aux fonds numériques, une fois l’argent liquide perdu ou volé, il est presque impossible de le récupérer, ce qui peut entraîner des pertes financières importantes. La circulation de fausse monnaie présente aussi un risque important dans les transactions en espèces.
Identifier les faux billets peut s'avérer difficile, surtout sans formation ou équipement spécialisé, ce qui peut entraîner des pertes financières potentielles et des complications juridiques pour les particuliers comme pour les entreprises".
Notre expert pointe du doigt " l'opacité des transactions en espèces qui peut conduire à des rapports financiers incomplets. Sans un historique clair des transactions, les organisations peuvent avoir du mal à fournir des états financiers précis, ce qui affecte la confiance des parties prenantes et le respect des normes réglementaires.
De nombreux cadres réglementaires exigent, en effet, des enregistrements détaillés des transactions pour prévenir les activités illicites telles que le blanchiment d’argent et l’évasion fiscale. L’anonymat inhérent aux paiements en espèces peut entraver les efforts de conformité, exposant les particuliers et les entreprises à des risques juridiques.
En conclusion, bien que les paiements en espèces soient une méthode de transaction traditionnelle, ils comportent des risques inhérents qui peuvent avoir un impact sur la sécurité financière et l'efficacité opérationnelle. L’adoption de solutions de paiement numérique et d’outils d’automatisation peut atténuer considérablement ces risques, conduisant à des pratiques financières plus sûres et plus transparentes".
M.B.S.M.

