Par Myriam BEN SALEM-MISSAOUI
L’initiative présentée par certains députés portant sur la reconversion de la Poste tunisienne en banque a-t-elle une chance d’aboutir face au monopole exercé par les banques classiques ?
Le Bureau de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) a officiellement transmis à la Commission des finances et du budget, le projet de loi n°82 de l’année 2025, portant création de la Banque postale, après avoir validé sa conformité aux exigences légales. « Ce projet de loi s’inscrit dans le droit fil de la stratégie censée améliorer l’accès des catégories vulnérables et des petites entreprises à des services financiers adaptés à leurs besoins, tout en luttant contre les différentes formes de marginalisation et d’exclusion ». La Commission des finances et du budget sera ainsi appelée à examiner le projet et à établir un calendrier d’auditions, lesquelles concernent notamment la Banque centrale de Tunisie (BCT), l’Association professionnelle des banques (APB), la Présidence du gouvernement, le ministère des Transports, le ministère des Technologies de la Communication, la Poste tunisienne ainsi que l’Autorité de la micro-finance, nous apprend une dépêche publiée sur Univers news. Selon la même source : « La création d’une banque postale, ardemment attendue par de nombreux citoyens, permettra de proposer des services financiers à des tarifs préférentiels et symboliques au profit des catégories fragiles ciblées par la stratégie nationale d’inclusion financière, mais également des artisans et travailleurs opérant dans l’informel. Cette banque postale sera une entreprise publique, soumise aux directives et recommandations de la Banque centrale de Tunisie ». A noter, par ailleurs, qu’après avoir cumulé durant la dernière décennie un déficit estimé à 120 MD, la Poste tunisienne a réussi à se redresser en enregistrant un résultat net estimé à 200 MD durant l’exercice de 2023. Un exploit qui la place largement devant les trois banques publiques, à savoir la STB, la BNA et la BH. Cette initiative a-t-elle une chance d’aboutir face au monopole exercé par les banques classiques ?
Démocratisation…
Interrogé à ce sujet, le cadre bancaire Houssine Chalghaf nous a confié : « Certes, une banque postale a une vocation sociale, mais elle doit s’adapter à la réalité du marché qui souffre déjà de plusieurs anomalies dues à la conjoncture économique, notamment aux risques de crédit élevés, une faible capitalisation et une dépendance accrue au financement de l'Etat. Alors, il faut que cette reconvention doive prendre en compte ces données afin de mieux intégrer le marché bancaire et financier ». Et d’ajouter : « Cela étant, la poste tunisienne a plusieurs atouts dont notamment son réseau postal qui est constitué de plusieurs points de contact dont plus de 1100 agences et bureaux, contre 5800 agences pour tout le secteur bancaire. Aussi, la Poste tunisienne est une entité financière qui tire parti de sa présence géographique et de sa notoriété pour offrir des services bancaires, notamment aux populations sous-bancarisées. Elle vise généralement à faciliter l'accès aux services financiers pour tous et à promouvoir le développement économique local ».
Intervenant, également, sur les ondes de radio Jawhara fm, le député de Monastir et représentant des initiateurs de la proposition relative à la création d'une banque postale, Mohamed Zied Maher, a indiqué : « La Poste tunisienne dispose déjà de l’infrastructure, des bureaux, du personnel, des distributeurs et des cartes de retrait nécessaires à l’exercice d’une activité bancaire ». Et d’ajouter : « Pour donner à la Poste tunisienne outre une solidité financière, nous proposons une augmentation du capital de soixante millions de dinars, le projet de loi définira, également, les services que la banque postale sera autorisée à fournir, ainsi que ses prérogatives. Selon ce projet, les règles applicables aux institutions privées de micro-finance s’appliqueront, en principe, aussi à la banque postale ».
M.B.S.M.