contactez-nous au 71 331 000
Abonnement

Elle descend au-dessous de la barre de 6%, selon l’INS : L’inflation ralentit, …mais les prix ne fléchissent pas

Par Hassan GHEDIRI 

Après avoir atteint son summum en février 2023, l’inflation a continué à fléchir pour retrouver son niveau d’il y a exactement trois ans et demi.

 

L’Institut national de la statistique (INS) a publié, avant-hier, son bulletin mensuel sur l’évolution de l’indice des prix à la consommation du mois de février 2025 dans lequel il met en lumière une nouvelle baisse du taux de l’inflation qui passe à 5,7% après avoir été de 6% en janvier dernier. Ce résultat vient ainsi confirmer la tendance baissière de l’inflation observée en Tunisie depuis environ deux ans. Après avoir atteint un sommet inégalé, en décembre 2022, en franchissant pour la première fois la barre symbolique de 10% et ensuite passer l’hiver et le printemps 2023 à flirter avec son taux à deux chiffres, l’inflation s’est, en effet, vue se positionner, très lentement, sur une pente descendante qui n’a été interrompue que par deux petits rebonds éphémères (avril 2023 et juin 2024).

A en croire les chiffres de l’INS, l’inflation poursuit donc son ralentissement bien que cette tendance ne semble pas avoir l’incidence souhaitée sur le pouvoir d’achat des ménages tunisiens. Si l’inflation ralentit, les prix ne descendent en effet pas. C’est un fait que l’on peut aisément vérifier en demandant à la première personne croisée dans un supermarché. Une inflation réduite à 5,7% est sans doute un signe encourageant, mais qui ne s’accompagne pas d’une baisse des prix de consommation de base. Le problème c’est que des scénarios (optimistes) prévoient que les prix continueront de monter même si l’inflation poursuit sa décélération. «Ce qui se passe, c’est la croissance des prix qui tend à devenir plus lente, pas les prix qui vont descendre», nous explique Mongi Mokaddem, ancien professeur d’économie à la faculté de Gestion de Tunis. 

Même si l’INS annonce que le taux de l’inflation au mois de février s’est replié à 5,7% contre 6% en janvier (et 6,2% en décembre et 6,6% en novembre…), «ceci ne soulagera malheureusement pas le pouvoir d’achat des ménages tunisiens pour la simple raison que nous vivons actuellement une phase de désinflation signifiant que les prix continueront d’augmenter mais à une vitesse moins accélérée», souligne notre interlocuteur. Il enchaine pour expliquer que c’est quand on est dans une situation de déflation qu’il y a une baisse durable et généralisée des prix. 

Loi de l’austérité 

Mokaddem croit que la question du ralentissement de l’inflation est un phénomène qui doit être traité avec beaucoup de prudence, d’autant plus que pour la majorité écrasante des Tunisiens souffrent de plus en plus pour subvenir à leurs besoins de consommation. «Quand ce sont les spéculateurs qui font la pluie et le beau temps dans le marché, les prix continueront à monter même si l’INS nous annonce une inflation de 2%», regrette-t-il.

Le recul de l’inflation ne se traduit donc point par une baisse des prix. Dans son bulletin, l’INS note qu’en glissement annuel, les prix des produits alimentaires ont augmenté de 7%. Une hausse principalement due à l’augmentation des prix de la viande d’agneau (+21,4%), des légumes frais (+18,7%), des fruits secs (+14,2%), du poisson frais (+13,4%) et des volailles (+10,5%). En revanche, les prix des huiles alimentaires ont diminué de 16,2%, explique-t-on. 

Mais sous un autre angle, d’aucuns tendent à croire que si l’inflation recule en s’engageant dans une courbe descendante depuis maintenant près de deux ans, la Banque centrale de Tunisie (BCT) devrait logiquement revoir son taux directeur à la baisse. En effet, durant tous ces derniers mois, le conseil d’administration de l’institut d’émission a toujours considéré que «les perspectives de l’inflation restent entourées de risques haussiers» jugeant nécessaire de «poursuivre le processus de désinflation». Une démarche qui demeurera d’actualité, estime notre interlocuteur. Il croit même que, contrairement à ce que l’on peut croire, ce n’est pas en fonction de l’évolution et de l’inflation que la BCT définit son taux directeur. «L’obstination à maintenir son taux directeur inchangé à 8%, la BCT peut tout simplement la justifier par la politique générale d’austérité adoptée par l’Etat qui vise à rationaliser les dépenses publiques», souligne Mokaddem. Et d’enchainer pour expliquer que le maintien du taux à 8%, selon ce raisonnement, est un instrument qui permet de comprimer la création de la monnaie pouvant résulter de l’augmentation des crédits. La conséquence de ce choix est un ralentissement économique, des investissements au point mort et un pouvoir d’achat en berne.  L’on ose ainsi dire que quelle que soit la baisse de l’inflation annoncée par l’INS, elle ne sera jamais suffisante pour convaincre la BCT qu’une baisse de son taux d’intérêt est nécessaire.

H.G.

Partage
  • 25 Avenue Jean Jaurès 1000 Tunis R.P - TUNIS
  • 71 331 000
  • 71 340 600 / 71 252 869