Par Wahid SMAOUI
En se colletant avec le grand Chelsea, l’EST nourrissait d’autant plus légitimement l’espoir de réaliser un haut fait que la gageure était circonscrite à 90’ de jeu seulement. Mais la réponse des Londoniens a mis ostensiblement à nu la tranchée multidimensionnelle.
Que ce dernier match de poule s’appréhende comme l’évasure menant aux 8es de finale ne relevait pas tant du suprasensible. Mais qu’il s’éprouve face à une aussi pyramidale pointure, voilà qui procédait de l’astronomique et qui conférait à l’entreprise espérantiste des contours oniriques. Et la vérité du terrain de le corroborer dans toute sa dimension marmoréenne, comme l’explicitent les statistiques et leur glaciale éloquence : possession de la balle (25%/75%), tirs (3/16), tirs cadrés (0/7), passes (235/683), corners (1/4)… C’est dire que le hiatus de mise s’est vérifié dans tous les registres du jeu, technique, physique, mental… A ce propos, les Sang et Or auraient pu s’offrir un tout autre canevas d’avant-match, de nature à lénifier un tant soit peu la tendance générale, devant s’en mordre les doigts pour n’avoir pas infligé aux Américains de Los Angeles FC, une équipe quelconque en dernier ressort, truffée plutôt de quadragénaires à l’instar des Lloris et autres Giroud, une déculottée à leur portée. Auquel cas, les Tunisiens, main dans la main au classement avec les « Pensioners », les auraient dépassés au goal-différence, et se seraient contentés d’une parité. Antinomiquement aux Anglais qui, obligation de résultat oblige, auraient pâti d’une certaine pression inhibitrice et se seraient enhardis davantage devant, se risquant, ce faisant, à concéder plus d’espaces dont raffolent les Espérantistes. Prêchi-prêcha que tout cela ? Cela en a tout à fait l’air, les Blues ayant administré une bien placide leçon de pragmatisme et de professionnalisme, nonobstant toutes données de départ, dans la gestion de tous les moments, faibles (y en a-t-il eu à leur passif ?) ou forts d’un match ayant tourné au final à un non-match. Comme justement les fameux temps additionnels et leurs retombées aussi cruelles que «mortelles».
Béants écarts de standards!
D’aucuns déplorent que l’EST n’ait ployé que dans les temps additionnels des première et seconde périodes, tenant « illusoirement » la dragée haute à son illustre antagoniste. Il ne s’agit surtout pas de se leurrer, attendu qu’il n’y a pas plus aisé en football que de prôner la défensive à outrance, une option qui finit toutefois par être ruineuse, si elle s’assimile à une fin en soi et non à une stratégie dictée certes par les moyens de bord mais préconisant le jeu en transition et le redéploiement offensif subséquents à un monumental travail de récupération. Or, comme le trahissent impassiblement les chiffres, on n’a rien vu de tel, même en termes de velléités. Ayant réalisé dès les premiers échanges que l’adversaire était loin d’être grand capitaine, les Britishs ont mis sereinement le siège dans la moitié de terrain espérantiste, s’adonnant à un flegmatique jeu de patience et d’insistance. Jusqu’à ce fameux temps additionnel au cours duquel un grand pan de différence de culture footballistique s’est donné à voir. Et « badaboum », coup sur coup deux buts des Blues ayant illustré l’inentamable présence d’esprit des uns et la répréhensible crédulité des autres. Même si sur le premier but, une balle arrêtée, les Tunisiens ont eu le temps de s’organiser mais la supériorité dans le duel aérien d’Adarabioyo au détriment de Tougai a fait la différence. Alors que la notoire prééminence technique de Delap sur le deuxième but, traduite par un dribble ayant mis Meriah dans le vent, a dit éloquemment son mot. La suite, on la connaît, à savoir une mainmise totale des Londoniens qui se sont contentés de gérer à leur guise le match, se ménageant en prévision de leur âpre belligérance contre les Portugais de Benfica en 8e de finale, manquant d’alourdir la note sans le brio de Ben Saïd, dont le seul bémol tout au long des trois matchs qu’il a fournis a trait au troisième but concédé. Qu’aurait été le rendement de l’EST si Blaili, son attaquant vedette, avait été de la partie ? Objectivement parlant, la physionomie du match n’aurait pas été trop dissemblable, rien qu’au vu de la nette supériorité physique des Anglais, intraitables dans les duels, un registre dans lequel l’Algérien n’aurait pu soutenir la comparaison et qu’il aurait édulcoré par quelques gestes techniques qui auraient pu indisposer l’arrière-garde angliche, sans plus. L’impression dominante chez les supporters qui, soit dit en passant, ont volé à l’occasion la vedette à leurs favoris, le match ayant beaucoup plus valu par le flamboyant spectacle qu’ils ont offert au monde entier, que par la prestation des joueurs, du moins pour le compte de cette dernière sortie, est que le Fennec les a une nouvelle fois trahis. Récidiviste impénitent, désespérément inéducable, l’Algérien s’est non seulement auto-flagellé mais a également brimé et frustré aussi bien son équipe que le large public espérantiste. Cela dit, il est bien entendu des plus sensés de positiver la participation de l’EST à ce Mondial des clubs, à condition d’apprendre de ce côtoiement du haut niveau et d’arrêter de se confondre en discours louangeurs quant au credo cher à Pierre de Coubertin, relatif à la participation pour la participation. Car prendre part à une coupe du monde dans sa nouvelle version n’a plus rien d’un exploit au vu du nombre élevé des équipes conviées et du déséquilibre de mise entre la plupart d’entre elles. Et on retrouvera sûrement les Sang et Or à pareille fête en 2029, 2033, 2037… Il suffit d’être champion à l’échelle nationale, un couronnement érigé en « tradition bien établie » en Tunisie pour les Espérantistes pour que tout s’enchaîne, entendons les tours les plus avancés en Ligue des champions africaine, désormais domestiqués. Si seule la gratification financière, certes irréductiblement appréciable, mais ne devant aucunement s’assimiler à une sacro-sainte finalité, est prise en compte, on peut dire adieu à jamais au saut qualitatif, footballistiquement parlant, après lequel les Tunisiens languissent tant. A l’ouvrage!
W.S.